Mettons les choses au clair: c’est quoi le zaratsu?
On parle beaucoup de zaratsu mais cette technique n’est pas toujours bien comprise. Je vous propose donc un article complet sur la question afin que le zaratsu n’ait presque plus de secrets pour vous !
Dans la bouche des Seikophiles revient souvent ce mot à la consonance tantôt exotique, tantôt Nietzschéenne. Il n’est pourtant pas question de zoroastrisme mais évidemment d’une technique de polissage du métal devenue synonyme de Grand Seiko. Mais qu’en est-il vraiment? D’où vient cette technique? Son nom? A quand remonte-t-elle? Quel est l’intérêt de ce polissage et qu’est-ce qu’il a de spécial? Bref qu’est-ce que c’est vraiment le zaratsu?
Un petit historique du zaratsu.
Comme d’habitude, le personnage à l’origine du fameux polissage zaratsu n’est autre que Taro Tanaka. Non pas que ce soit le fameux designer qui se soit essayé au polissage, mais cette technique n’est en fait que la conséquence de la Grammaire du Design. Cette philosophie du design si spécifique ne peut s’exprimer que grâce à un polissage exemplaire qui permettra de proposer des angles acérés et des surfaces au poli miroir irréprochable. Mais le zaratsu, de par ses reflets parfaits, permet également la création des jeux de lumière qui sont au cœur de la Grammaire du Design. Sans zaratsu, pas de Grammaire du Design et sans Grammaire du Design, pas de zaratsu.
Le zaratsu n’est donc pas une fin en soi, mais simplement une conséquence de la philosophie du design insufflée par Taro Tanaka.
Le zaratsu a donc été développé sous l’impulsion de Taro Tanaka pour répondre aux besoins de la Grammaire du Design, en entente avec les ingénieurs de Daini Seikosha et Suwa Seikosha, les deux maisons historiques de la marque, et leurs sous-traitants fabricants de boitiers, dont Hayashi Seiki Seizo.
Le nom de zaratsu vient du nom des machines allemandes Sallaz que Seiko a utilisé et modifié pour créer leur technique de polissage. Il s’agissait de lapidaires qui étaient utilisés dans l’industrie horlogère Suisse à cette époque. Comme souvent dans la culture Japonaise, ils ont su prendre ce qui se faisait de meilleur pour l’adapter à leur façon et l’améliorer. On retrouve encore une fois l’état d’esprit insufflé par Shoji Hattori, le PDG de Seiko à l’époque, « rattraper et dépasser la Suisse ».
La première Grand Seiko a profiter de ce polissage Zaratsu est la 57GSS aka Grand Seiko Selfdater. Et pourtant, il ne s’agit pas d’une montre qui incarne pleinement la Grammaire du Design ! C’est pour cela que bien qu’il s’agisse de la première montre à utiliser cette technique de polissage, elle ne met pas autant en valeur le zaratsu que la fameuse 44GS qui sortira quelques années plus tard et qui sera la plus pure incarnation de la Grammaire du Design.
Source: grandseikogs9club.com
On voit donc ici une idée importante du zaratsu, c’est que celui-ci est indissociable du design. Celui de la 44GS mettant clairement plus en avant cette technique que celui de la 57GSS.
Bon, mais venons-en aux faits:
C’est quoi le zaratsu?
Le zaratsu n’est qu’une des étapes du polissage du boîtier.Alors comment se passe le polissage?
La première étape pour permettre un résultat final parfait, c’est de forger le boitier à froid. Au lieu de former la boite avec du métal chaud et facilement malléable, celui-ci est forgé avec une pression très importante mais une température basse. Cela permet d’obtenir un métal plus dur, qui réagira donc mieux au polissage.
Source: Joe Kirk
Le boîtier est ensuite poli de manière classique à l’aide de polisseuses et de disques feutres pour commencer à lui donner son brillant.
Source: seikowatches.com
Vient ensuite la partie qui nous intéresse, celle du zaratsu à proprement parler. Le polisseur ou la polisseuse va appliquer le boîtier contre la partie plate du disque de polissage. Le but est de faire varier le grain du disque en allant jusqu’au plus fin, en adaptant le lubrifiant ou l’agent de polissage utilisé ainsi que la pression exercée contre la machine, tout en contrôlant que la température du boîtier n’augmente pas afin de ne pas modifier les propriétés du matériaux.
Ensuite, le boîtier est légèrement avivé à l’aide d’une meule visiblement en coton pour révéler l’éclat donné par le zaratsu.
Source: seikowatches.com
Enfin, pour terminer les parties satinées sont faites à la main, même à main levée pour être plus précis, avec un abrasif spécifique. Selon le design du boîtier, cela peut être fait contre un grand disque abrasif fixe, soit en utilisant un petit outil au bout duquel l’abrasif est fixé.
Source: Joe Kirk
Source: watchonista.com
Le polissage du boîtier est donc quelque chose de très complexe qui nécessite une vingtaine d’étapes, dont le zaratsu n’est qu’une partie. Tout est évidemment fait à la main, que ce soit le zaratsu ou les autres étapes.
Source: Fratello Watches
L’objectif est d’obtenir un poli miroir parfait, comparable dans l’idée au poli bloqué ou poli noir que l’on voit sur certaines pièces des mouvements de haute horlogerie Suisse. Le nom de poli noir vient du fait que si le polissage est absolument parfaitement plat, il renvoie toute la lumière dans une seule direction, ce qui fait que la pièce polie apparaît blanche ou noire selon l’angle de la lumière. Pour obtenir un poli noir, on frotte une pièce d’acier contre une plaque de zinc avec un agent polisseur (généralement de la diamantine). Pour le zaratsu, ça n’est pas le boîtier qui bouge mais le disque polisseur (dont la composition est gardée secrète par GS ! Certains semblent parler de zinc justement) contre lequel le boîtier sera délicatement appliqué. Le résultat final est très semblable entre ces deux techniques, les surfaces apparaissant tantôt noires tantôt blanches permettant des jeux de lumières fabuleux.
Qu’est-ce qui différencie le polissage zaratsu d’un polissage classique?
Il y a deux caractéristiques centrales dans le zaratsu.
La première, c’est que sur les surfaces planes, le reflet ne doit présenter aucune distorsion, c'est-à-dire que la surface agit comme un miroir parfait et non pas comme un miroir déformant.
Polissage classique
Polissage zaratsu
La seconde est plus difficile à exprimer, mais je dirais que le reflet doit être en Haute Définition. Là où un bon polissage classique offre un reflet en 720p, le zaratsu propose un reflet en 4K. Cela se voit aussi bien sur les surfaces planes que les surfaces courbées.
Source: Joe Kirk
Source: Joe Kirk
Qu’est-ce qui rend le zaratsu aussi complexe?
Le zaratsu est une technique complexe qui demande des années de formation avant de pouvoir travailler sur des boîtiers Grand Seiko. Mais qu’est-ce qui rend cette technique aussi complexe?
Au-delà du toucher nécessaire et même de l’ouïe nécessaire (les maîtres polisseurs disent que c’est le son que fait le boîtier contre le lapidaire qui leur indique quand le résultat escompté est obtenu), la complexité du zaratsu réside en deux points.
Le premier est le design du boîtier. Certains designs seront plus simples avec moins d’angles et peu de surfaces polies. D’autres seront plus complexes avec parfois quatre surfaces qui doivent se rejoindre en un point unique, de large surfaces planes qui se transforment en surfaces courbées, des angles acérés entre deux surfaces polies etc.
Source: gnktwatch.blogspot.com
Appréciez la façon dont le satinage suit la courbe de la corne de cette SBGA103
Le second point qui peut rendre le zaratsu plus complexe est le matériau utilisé. Par exemple, le titane est notablement plus complexe à polir que l’acier. L’or étant beaucoup plus mou que l’acier, il est aussi plus long à polir si on veut obtenir un polissage sans distortion. Ces deux métaux mettent tout les deux 1,5x plus de temps à polir que l’acier. Pendant longtemps Grand Seiko n’utilisait pas le platine car ce métal est réputé pour être particulièrement difficile à polir car il est très mou et a tendance à se tacher de points noirs s’il est mal travaillé.
Source: A Blog to Watch
Source: A Blog to Watch
Il a fallu plus d’un an de travail à Kuroki Tomoshi pour adapter le zaratsu au platine pour la création du modèle Masterpiece SBGD001 (devenu SBGD201). Le platine prend 5 à 6 fois plus de temps à polir que l’acier !
Tomoshi san
Source: Seikowatches.com
Le zaratsu est compliqué aussi car tout est fait à la main et il faut maintenir la symétrie parfaite des cornes et l’équilibre du design. Lorsqu’une surface est trop polie, cela change ses dimensions, ses interactions avec les autres surfaces et donc l’équilibre général et la symétrie avec les autres cornes.
Ces quelques informations permettent de comprendre deux autres points importants pour le zaratsu: d’une part, il y a zaratsu et zaratsu. En effet, selon le design et le matériau utilisé, un boîtier peut être relativement simple à travailler comme il peut être extrêmement complexe. Encore une fois, le zaratsu n’est qu’une technique au service d’un design, l’utilisation de la technique en elle-même variera selon les montres. Toutes les montres ne naissent donc pas égales et tous les zaratsu ne se valent pas tout à fait !
D’autre part, on voit que depuis les années 60, la technique a grandement évolué.
Comme cela a été évoqué, une des évolution majeure du zaratsu ces dernières années est l’adaptation de cette technique à divers matériaux comme le titane, l’or et le platine. L’autre évolution est la façon d’appliquer le zaratsu aux surfaces courbées pour s’assurer que le reflet ne soit pas déformé. C’est pour la série de montres Thin Dress, dont le design a été conçu par Kiyotaka Sakai en s’inspirant de la légèreté et des courbes élégantes des voiles de voiliers, que le zaratsu a évolué afin que le polissage de ces surfaces élégamment courbées de cette série de montres soit parfait bien qu’il n’y ait pas de surfaces planes.
Évidemment Grand Seiko n’utilise plus les machines Sallaz mais leurs propres machines développées et adaptées en interne.
Le zaratsu et le marketing
Bon, on ne peut pas parler de zaratsu sans évoquer le marketing. En effet, cette technique est beaucoup mise en avant dans la communication de la marque. La plupart des amateurs d’horlogerie qui ont entendu parler de GS ont également entendu parler de zaratsu, les deux étant devenus indissociables. Seiko utilise également de plus en plus cet argument.
Mais finalement, est-ce que le zaratsu ne serait pas qu’un simple argument marketing? Après tout, d’autres grandes maisons comme Rolex ou Vacheron Constantin utilisent aussi des lapidaires. Est-ce qu’une Seiko à 1500€ peut être polie comme une Grand Seiko à plus de 6000€?
Alors évidemment, le zaratsu est devenu un argument marketing, une des signatures de Grand Seiko. Mais comme on l’a vu, ça n’est pas juste de la poudre aux yeux, mais bien une technique spécifique qui découle d’une approche du design propre à la marque. Le zaratsu n’est pas que l’utilisation d’un lapidaire, c’est un technique complexe avec différentes étapes, différents grains, différents agents polisseurs. Mais surtout, comme cela a déjà été dit, il y a zaratsu et zaratsu. Il y a la qualité de polissage en lui même (pas de distorsion, reflet « 4K »), mais il y a aussi des designs plus ou moins complexes et des matériaux plus ou moins difficiles à travailler.
Comme souvent avec les Japonais, ils ont su prendre des techniques Européennes pour s’en imprégner, les modifier et les adapter à leur façon.
Quant au résultat final, qui reste quand même le plus important, je vous invite à comparer tous les points évoqués précédemment avec d’autres montres en main, vous vous rendrez compte que Grand Seiko n’a pas à rougir même face aux plus grands, que ce soit dans les marques industrielles ou même chez les plus grands indépendants !
Mais il est vrai que l’argument zaratsu est maintenant utilisé à un peu toutes les sauces, y compris sur des plongeuses Prospex par exemple. Alors qu'en est-il vraiment? Je pense que vous avez maintenant les informations nécessaires pour en juger: est-ce que le boîtier a été forgé à froid? Quelle est la complexité du design de la boîte? Y a t’il beaucoup de surfaces polies? Les angles sont-ils complexes? Y a t’il plusieurs surfaces qui se rejoignent en un seul point? Le reflet est-il sans distorsion ou légèrement déformé? Les arêtes sont-elles parfaitement nettes? Est-ce un reflet « 4K » ou très légèrement trouble? Bref, vous savez maintenant juger un polissage digne de ce nom ! Ne vous arrêtez pas à la simple dénomination de zaratsu mais jugez ce qu’il en est par vous même et souvenez-vous: il y a zaratsu et zaratsu !
Quelques incompréhensions au sujet du zaratsu
Il me semble intéressant de revenir sur certains détails qui ne sont parfois pas très bien compris au sujet du zaratsu.
Tout d’abord, on entend parfois que le polissage zaratsu est hérité du polissage des katana. Pourtant, la communication de Grand Seiko ne va pas dans ce sens. Je pense que cette idée vient de la gamme Ananta qui bénéficiait du polissage zaratsu et dont le design des boitiers était inspiré du design des katana.
Cependant, cette idée n’est pas complètement fausse puisque pour polir les katana, les maîtres polisseurs utilisent des pierres parfaitement plates de différents grains afin d’apporter un poli miroir parfait au tranchant de la lame. Mais comme nous l’avons vu, bien que l’idée générale soit semblable, le zaratsu vient de machines allemandes et non pas des forgerons de katana !
L’autre point important à souligner concerne les index et les aiguilles. On lit souvent que ceux-ci sont également poli zaratsu, mais il n’en est rien ! Bien que le résultat soit également un reflet miroir parfait, les moyens pour y arriver sont très différents. En effet, ceux-ci sont diamantés et contrôlés à l’œil pour une découpe parfaite, puis rhodiés. Une finition striée (index) ou satinée (aiguilles) peut ensuite être appliqué à la main. On voit donc que le procédé n’a rien à voir même si les résultats sont identiques: des reflets miroir absolument parfaits ! Les différentes étapes sont bien visibles dans cette vidéo par exemple.
Enfin, on peut parler de l’exclusivité du zaratsu. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce polissage n’est pas exclusif à Grand Seiko. En effet, on retrouve cette technique basée sur l’utilisation des machines Sallaz chez d’autres marques japonaises comme la micro-marque Minase. D’autre part, Hayashi Seiki Seizo qui est un sous-traitant historique de Seiko Instruments et qui appartient en partie au groupe fabrique également des boitiers pour Citizen et Casio.
On peut également citer Kamil de Lapinist qui propose des restaurations de boîtiers de Seiko et GS vintage et qui a réussi à développer et maîtriser de manière très impressionnante sa propre version du zaratsu, sans avoir pour autant eu accès aux secrets bien gardés de la maison Japonaise !
Mais surtout, c’est bel et bien Grand Seiko qui a la légitimité historique de l’utilisation de cette technique puisque comme nous l’avons vu, c’est eux sous l’impulsion de Taro Tanaka, qui ont développé cette technique découlant naturellement de l’application de la Grammaire du Design.
Conclusion
Le zaratsu est une technique complexe intimement liée à la Grammaire du Design. Comme nous l’avons vu, le zaratsu et le design de la boite sont en fait indissociables. Le zaratsu permet de matérialiser concrètement un certain design et le design permet d’apprécier la maîtrise poussée que les artisans polisseurs ont de leur art.
Il s’apprécie aussi bien dans la qualité du reflet qu’il propose que dans la complexité de la géométrie qu’il sculpte. Il permet également la création des jeux de lumières qui sont au centre de la Grammaire du Design. Le zaratsu s’inclut donc dans une démarche globale qui n’est autre que l’essence même de Grand Seiko, ce qui explique que GS et le zaratsu soient finalement liés de manière indissociable: c’est bel et bien chez Grand Seiko que le zaratsu prend tout son sens et réciproquement, Grand Seiko ne peut pas exister sans le zaratsu.
J’espère que cet article vous aura plu et que grâce à lui, le zaratsu n’aura plus de secrets pour vous, que ce soit dans son origine, son application ou la façon de le juger et l’apprécier.
Si vous avez des questions, comme d’habitude n’hésitez pas à les poser dans les commentaires !
Quelques liens pour aller plus loin:
https://deployant.com/inside-seiko-p2-3-shiojiri-cold-forging-zaratsu-and-the-9f/
https://www.seikowatches.com/jp-ja/special/tokinowaza-since1881/kuroki/process/
https://www.watchuseek.com/threads/understanding-grand-seiko-part-3-case-manufacturing-and-zaratsu-finishing.4335490/
https://www.grand-seiko.com/us-en/special/dream9stories/vol9/1/
http://archive.horlogerie-suisse.com/articles/DavidChokron/Seiko/Seiko-qualite-horlogere-et-choc-des-cultures-15451311.html
Suwa vs Daini: l’histoire d’une rivalité
Quand on parle de Seiko vintage, il y a deux noms qui reviennent systématiquement: Suwa Seikosha et Daini Seikosha. Comme vous le savez sûrement, il s’agit des deux grands sites de production qui fabriquaient et fabriquent toujours (sous d’autres noms) les montres qui sont ensuite commercialisées par Seiko Watch Corporation.
Mais en fait, Suwa et Daini, c’est qui, c’est quoi?
Crédit: Anthony Kable www.plus9time.com
Quand on parle de Seiko vintage, il y a deux noms qui reviennent systématiquement: Suwa Seikosha et Daini Seikosha. Comme vous le savez sûrement, il s’agit des deux grands sites de production qui fabriquaient et fabriquent toujours (sous d’autres noms) les montres qui sont ensuite commercialisées par Seiko Watch Corporation.
Mais en fait, Suwa et Daini, c’est qui, c’est quoi?
Il me semble utile de reprendre quelques notions historiques au sujet de ces deux usines, que ce soit pour mieux comprendre l’organisation générale de Seiko, la façon dont la marque a évolué depuis un siècle, mais aussi comment la rivalité fraternelle entre ces deux centres névralgiques de Seiko a pu être utilisée de manière positive par Seiko Watch Corporation pour propulser la marque au sommet de l’horlogerie mondiale.
Je vous propose donc dans un premier temps de reprendre un historique rapide et quelques points clés de l’histoire et l’évolution de Seikosha, de Daini et de Suwa, puis dans un deuxième temps d’illustrer la rivalité qui anime ces deux maisons depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale jusqu’à nos jours.
Seikosha
Daini Seikosha signifie littéralement « la seconde Seikosha ». Il faut donc parler d’abord de la première Seikosha…
L’usine Seikosha vers 1897
Crédit: https://museum.seiko.co.jp/en/seiko_history/company/company/001/
Comme vous le savez, Kintaro Hattori a ouvert son atelier de réparation et de ventes d’horloges d’occasion dans le quartier de Ginza en 1881, sobrement appelé K Hattori. Les bénéfices tirés de cette activité lui permettent ensuite de devenir importateur, grossiste et détaillant d’horloges Européennes. Depuis le début, sa volonté est d’avoir sous sa responsabilité toutes les étapes de la vie d’un garde-temps, de sa fabrication à son entretien en passant par sa vente. Sa boutique ayant un franc succès, les bénéfices qu’elle génère lui permettent de racheter des locaux et d’ouvrir en 1892 sa propre usine de fabrication d’horloges qui seront vendues aux côtés des autres horloges importées dans sa boutique. C’est la naissance de Seikosha.
Initialement spécialisée dans la fabrication d’horloges, Seikosha se met ensuite à fabriquer des réveils, puis des montres de poches. À partir de 1913, Seikosha commence également à produire des montres bracelets.
Lorsque Kintaro Hattori décède en 1934, se sont ses deux fils Genzo et Shoji qui reprennent le flambeau. Ils prendront une décision très importante lors de leur arrivée à la tête de l’empire familial: séparer la fabrication de montres bracelets de celle des réveils et des horloges.
L’usine Seikosha en 1930
Crédit: museum.seiko.co.jp
Daini Seikosha
En 1937 est inauguré dans le quartier de Kameido l’usine «Daini Seikosha Kameido», littéralement “la deuxième Seikosha de Kameido”. Les horloges et réveils sont toujours produits par Seikosha et les montres bracelets sont fabriquées par Daini Seikosha.
Avec l’entrée en guerre des Japonais contre les Américains lors de la Seconde Guerre Mondiale, Tokyo est rasée par les bombes et Daini Seikosha n’échappe pas aux bombardements. Heureusement, les dirigeants du groupe avaient senti venir le danger. La quasi-totalité du personnel et du matériel est mis à l'abri au cœur des Alpes japonaises dans ce qui deviendra Suwa Seikosha.
Après la guerre, l’usine Daini Seikosha est reconstruite à Kameido et la production de montres reprend dès 1948. Cette usine fonctionnera durant 50 ans et fermera ses portes en 1998. Daini Seikosha changera de nom en 1983 pour devenir Seiko Instruments & Technology, puis en 1997 pour devenir Seiko Instruments Inc, ou SII ou SII pour les intimes. La majorité de la fabrication des pièces et des mouvements pour le marché Japonais est alors transférée dans le nord du Japon, à Morioka Seiko Instruments Inc., fondé en 1970. D’autres succursales sont ouvertes en Asie et au Brésil pour compléter l’offre de SII pour le marché international.
Aujourd’hui, SII (Seiko Instruments Inc.) est une des trois grandes entités du groupe Seiko, avec Seiko Holdings Corporation et Seiko Epson. Les montres fabriquées par SII et Seiko Epson sont commercialisées par Seiko Watch Corporation, une des branches de Seiko Holdings Corporation.
Pour compliquer un peu les choses, SII est depuis 2009 une branche de Seiko Holdings Corporation.
Crédit: http://orientplace.blogspot.com/2018/06/are-orient-and-seiko-truly-independent.html
Les hauts faits de Daini Seikosha
Quelques créations sorties tout droit de Daini Seikosha ont marqué l’histoire de Seiko. On peut citer la Seiko Cronos, la naissance de King Seiko, la fameuse 44GS, la 45GS et son excellent calibre 45 décliné en version VFA et Astronomical Observatory Certified, les chronographes de poche des JO de 1964 dont les versions Hi Beat à rattrapante et ultra Hi Beat 360,000 alternances par heure, le fabuleux calibre 68 extra plat dont je vous ai déjà parlé dans cet article, l’excellent calibre 52, dernier calibre mécanique haut de gamme de Seiko avant le tsunami du quartz, puis ses évolutions modernes que sont les calibres 4S (ayant récemment évolué en 6L) puis le chronographe 6S. Enfin, il est impossible de ne pas citer le fameux calibre 9S de Grand Seiko dans toutes ses déclinaisons ainsi que le tourbillon Credor (basé sur le calibre 68), puisque c’est SII qui produit tous les mouvements des Grand Seiko et Credor mécaniques. Plus récemment, Grand Seiko a dévoilé son tourbillon à force constante dont il est question ici.
Boîtiers et cadrans sont fabriqués par Shokosha, un sous-traitant appartenant également au groupe Seiko.








L’identité de Daini Seikosha
Daini se distingue par une approche plus traditionnelle de l’horlogerie et plus particulièrement par sa maîtrise des hautes fréquences et des calibres ultra plats.
La 44GS de Daini est surtout connue pour son design mais son calibre 44 à remontage manuel est le meilleur calibre « low beat » (c’est à dire battant à 18,000 bph) que la marque ait produit, avec toute l’excellence de l’horlogerie classique mélangée au savoir-faire propre à Daini.
Bien que la Lord Marvel 36000 fut mise au point par Suwa, Daini a montré son expertise dans le domaine des hautes fréquences avec les chronographes de poche des JO de 1964 (dont certains battent à 36000 et même 360000 bph) ou le fameux calibre 45 Hi Beat à remontage manuel.
La 45GS VFA
On peut également noter le calibre 19, seul mouvement Hi Beat pour femme au monde, qui équipe entre autre les 19GS dans sa version la plus haut de gamme. Les calibres modernes 9S8x Hi Beat et Hi Beat GMT en sont un autre exemple.
Les calibres ultra fins sont aussi une spécialité de la maison avec la Goldfeather sortie en 1960, la montre à seconde centrale la plus fine de son époque, puis le fameux calibre 68 toujours utilisé de nos jours chez Credor.




Les calibres mécaniques haut de gamme sont devenus la chasse gardée de SII, mais l’entreprise fait un grand écart entre ces mouvements et la fabrication à la chaîne de millions de mouvements quartz pour les différentes marques de Seiko ainsi que pour la distribution à d’autres marques.
De part sa longue implantation à Tokyo, les productions de Daini sont également très appréciées des collectionneurs Tokyoïtes !
Voici une excellente vidéo qui regroupe différentes productions de SII montrant leur quête vers les hautes fréquences.
Quelques noms associés à Daini
Shoichiro Komaki
Komaki san est un des grands noms derrière le succès de Seiko aux JO de 1964. Il a joué un rôle central dans la création des chronographes de poche qui ont permis à Seiko de décrocher le contrat. Il a également joué un rôle clé dans la participation de Daini aux concours de chronométrie Suisse et dans le développement des montres à quartz. Il était à la tête du pôle R&D de Daini durant cette période cruciale de l’histoire de la marque et a donc été un des moteurs de la réussite de Seiko dans ces moments décisifs.
Shoichiro Komaki
Crédit: https://blog.canpan.info/nsk/archive/2542
Akira Ohira
C’est l’acteur central dans le retour de Seiko sur le devant de la scène avec les montres mécaniques haut de gamme dans les années 90. C’est le père du calibre 9S et lui qui a formé tous les horlogers qui travaillent sur les GS mécaniques maintenant. Bien qu’il ait dépassé l’age de la retraite, il travaille encore pour Seiko, en particulier pour la formation des horlogers chargés du SAV de Seiko dans le monde entier. Il fut également en charge de l’installation d’usines SII en Asie et au Brésil.
Il est surnommé « le dieu du réglage » par les connaisseurs et est clairement la figure centrale mais trop peu connue de Morioka.
Crédit: Ken Hokugo
Mamoru Sakurada
C’est le spécialiste du calibre 68 et longtemps le seul horloger abilité à toucher ces mouvements. La finesse des pièces et le fait qu’elles aient souvent été dans un premier temps gravé avec la plus grande délicatesse nécessite que la personne chargée de l’assemblage vérifie la planéité des ponts à la seule sensibilité de la pulpe de ses doigts, puis ajuste celle-ci d’une légère pression si cela s’avère nécessaire. Aujourd’hui à la retraite, il a transmi son savoir-faire à Katsuo Saito qui assure maintenant la relève.
Mamoru Sakurada
Crédit: https://dreamsquare.seikowatches.com/jp-ja/
Katsuo Saito
Crédit: Hodinkee
Satoshi Hiraga et Tsutomu Ito
Satoshi Hiragana et Tsutomu Ito représentent la nouvelle garde des horlogers de SII. Rentrés chez Seiko à peu près au même moment (1989 et 1991), ils ont été tous les deux formés par Akira Ohira. Aujourd’hui, Satoshi Hiraga est entre autres en charge de l’assemblage du tourbillon calibre 6830 alors que Tsutomu Ito est responsable de l’assemblage des calibres 9S et il est particulièrement réputé pour l’ajustement des spiraux. Hiraga san est habitué à voyager à travers le monde pour participer à divers évènements et vous l’avez peut-être déjà croisé dans une soirée spéciale d’une des Seiko boutiques de France ou d’ailleurs.
Satoshi Hiraga
Crédit: paflechien33 sur lallement.com
Tsutomu Ito
Crédit: http://seiko.aydinsaat.com/world/tokinowaza/ito/interview/
Voici une vidéo absolument exceptionnelle, déterrée des tréfonds du YouTube Japonais. Vous pouvez y voir un jeune Ito san à l’établi avec son sensei Ohira San par-dessus son épaule qui lui transmet son savoir-faire légendaire. Les deux homme partagent aussi un repas et quelques bières avec Sakurada san. C’est une vraie émotion que de voir ces grands noms réunis, il y a 20 ans en arrière… Même sans comprendre le Japonais, ces images sont précieuses et le testament d’une grande époque à Morioka…
Suwa
Image tirée de The Seiko Book
En 1942, Hisao Yamasaki fonde dans la ville de Suwa, au cœur des Alpes Japonaises, la compagnie Daiwa Kogyo qui devient sous-traitant pour Daini Seikosha. L’année suivante, Daini et Daiwa Kogyo fusionnent et Daini envoie des employés et un maximum de machines loin de Tokyo, à l’abri des bombes qui pleuvent. C’est la création de Daini Seikosha Suwa, à ne pas confondre avec Daini Seikosha Kameido situé à Tokyo. En 1959, le nom change pour devenir tout simplement Suwa Seikosha après la fusion acquisition des deux entités.
Bien que Suwa fut fondée et construite grâce aux moyens et au personnel de Daini Seikosha, les deux entreprises sont bien deux entités totalement séparées, aussi bien d’un point de vue administratif que financier ou organisationnel .
À l’instar de Daini, Suwa fabrique ses propres montres qui sont commercialisées par K Hattori (futur Seiko Watch Corporation).
L’entreprise sera très fortement influencée par Tsuneya Nakamura qui terminera d’ailleurs sa carrière comme président.
Lors des JO de 1964, Suwa invente ni plus ni moins que l’imprimante éléctronique qui permet d’imprimer les résultats des épreuves chronométrées. Quelques années plus tard en 1968 sort l’EP-101 (pour Electronic Printer), qui donnera son nom à Epson, pour « son of Electronoic Printer ». En 1985, Suwa Seikosha prendra le nom de Seiko Epson.
Mais de nos jours, on peut noter que Seiko Epson possède deux marques de montres qui ne sont pas distribuées par Seiko Watch Corporation mais directement par eux: Trume et Orient.
Les hauts faits de Suwa
C’est à Suwa que l’on doit des innovations majeures pour Seiko comme le Magic Lever (système de remontage automatique), la première montre à quartz, le premier chronographe automatique au monde, l’invention des mouvements Kinetic et Spring Drive etc.
C’est évidemment aussi chez Suwa que l’on voit naître Grand Seiko et des familles emblématiques et très modernes de GS pour leur époque comme les 62GS automatiques ou la 61GS Hi Beat automatiques, concurrente de la 45GS Hi Beat manuelle de Daini. Les 56GS seront elles le début de l’industrialisation des montres avec des mouvements assemblés à la chaîne, montrant là aussi la modernité propre à Suwa.
Cherchez l’intru…
Crédit: Ikigai Watches
Suwa s’est aussi distingué avec la création de toutes les premières plongeuses de Seiko, de la 62MAS à la Tuna quartz, sous la direction de Taro Tanaka.



Mais évidemment, Suwa s’est démarqué sur la scène mondiale en 1969 avec la commercialisation à quelques mois d’écart du premier chronographe automatique au monde et de la première montre à quartz au monde.
Deux Speed-Timer faisant partie des tout premiers chronographes automatiques au monde
Crédit: inconnu
Aujourd’hui Seiko Epson se distingue par la fabrication des Seiko Astron GPS, des Grand Seiko et Credor à quartz et Spring Drive, et avec le fameux Micro Artist Studio. Tout comme SII, ils fabriquent aussi des mouvements quartz entrée de gamme par millions. À la différence de SII, Seiko Epson fabrique et poli la grande majorité de ses boitiers alors que SII travaille avec leur sous-traitant historique Hayashi Seiki Seizo.
L’identité de Suwa Seikosha
Si Daini représente une approche traditionnelle de l’horlogerie, Suwa incarne la modernité et l’innovation. Je pense qu’il n’est pas exagéré d’attribuer au moins en partie ces caractéristiques à Tsuneya Nakamura, figure centrale de Suwa.
Les Grand Seiko modernes sont une parfaite illustration de cette différence entre les deux maisons. Au-delà des mouvements mécaniques qui sont propres à SII Morioka et des Quartz et Spring Drive propres à Seiko Epson, le design des montres, les matériaux utilisés ou encore les cadrans que l’on retrouve aujourd’hui sur les GS de Shiojiri (ville proche de Suwa où sont fabriquées les GS 9F et 9R) montrent un approche plus moderne et novatrice, là où les modèles mécaniques de Morioka se veulent plus sobres et traditionnels dans leur approche de l’horlogerie. Ca n’est d’ailleurs que récemment avec les plongeuses Hi Beat SBGH255 et 257 de Morioka a produit des GS typées sport.
Quelques noms associés à Suwa
Tsuneya Nakamura
Son nom ayant déjà été cité plusieurs fois, vous vous doutiez sûrement qu’il allait apparaître ici. Nakamura faisait partie des employés de Daini à être envoyé à Suwa pendant la guerre. Il est l’inventeur du Magic Lever mais il dirigera aussi tous les projets essentiels de Suwa, de la création de Grand Seiko aux concours de chronométrie en passant par la création de la première montre à quartz au monde. Comme cela a été dit un peu plus tôt, il finira sa carrière comme président de Suwa Seikosha.
Tsuneya Nakamura
Kiyoko Nakayama
La seule femme dans l’histoire de la marque à avoir son nom cité quelques rares fois, Nakayama s’est distinguée par ses capacités en tant que régleuse. Elle fait partie des meilleurs horlogers de Suwa Seikosha et a participé aux concours de chronométrie en Suisse. Elle explique que son succès est dû à deux choses: elle ramenait des mouvements à la maison pour continuer à s’entraîner, et surtout elle ne transpire pas des mains, ce qui d’après elle est essentiel pour que les pièces assemblées ne s’oxydent pas. Après les concours de chronométrie, elle fit partie de l’équipe en charge d’assembler et de régler les 61GS VFA.
Tokuaki Miura
Miura san fait partie de ces noms inconnus de la plupart des amateurs de Seiko, et pourtant il fut un des acteurs essentiels de l’histoire de la marque. Designer chez Suwa Seikosha, diplômé de l’Université des Arts de Tokyo, c’est à lui que l’on doit le design de nombreux chronographes iconiques de la marque comme le fameux chronographe Pogue et les autres déclinaisons des 6139-600x, y compris la version Sunrise ou encore le chrono Panda et le Holy Grail. C’est aussi lui qui a créé le logo de Suwa surnommé en Japonais « le nombril ».
Le logo « nombril » du Suwa, à ne pas confondre avec le logo éclair de Daini
Yoshikazu Akahane
Yoshikazu Akahane est surtout connu pour être le cerveau derrière l’idée et la conception du Spring Drive. Il s’est écoulé environ 30 ans entre le moment où l’idée a germé dans sa tête et la commercialisation des premiers Spring Drives, qu’il ne verra malheureusement pas puisqu’il décédera juste avant. Cette petite révolution horlogère, ou la révolution silencieuse comme Seiko aime l’appeler, ne doit son existence qu’à la ténacité d’Akahane qui poursuivra ses recherches en dehors de ses heures de travail et malgré l’opposition de ses supérieurs.
Kenji Shiohara
À la fin des années 90, Shiohara fait partie des derniers horlogers de Seiko Epson a avoir été formé dans les années 70 et avec de vraies compétences en horlogerie mécanique. C’est lui qui est chargé de réparer la montre du président de l’entreprise, une montre mécanique Jean Lassale (unique marque Suisse appartenant à Seiko) de seulement 1,2mm d’épaisseur. En échange, il demande de pouvoir créer un petit atelier qui aura pour but de perpétrer le savoir-faire de Seiko dans la haute horlogerie et en particulier avec l’idée de faire des montres vraiment durables.
Il fonde le Micro Artist Studio et crée avec son équipe des montres mythiques comme les Credor Eichi, Sonnerie et Répétition Minute. Le MAS étant une émanation d’Epson, vous comprenez maintenant pourquoi ils ne proposent que du Spring Drive.
Shiohara à l’écoute d’un bol Orin dont on retrouve une version miniaturisée dans la Credor Sonnerie
Crédit: https://quillandpad.com/2020/09/13/seikos-secret-specialist-haute-horlogerie-micro-artist-division-in-japan/
Crédit: https://global.epson.com/innovation/artisan/awards.html
Yoshifusa Nakazawa
Nakazawa est le visage du Micro Artist Studio. Natif de Suwa, il rejoint la grande entreprise locale en 1979 et remporte en 1981 la médaille d’or au Olympiades des Métiers d’Atlanta dans la catégorie réparation de montres. Héritier de Shiohara, il est maintenant chargé de transmettre tout son savoir sur l’assemblage de ces pièces d’exceptions, en particulier de la Sonnerie, à la prochaine génération. Vous l’avez probablement aperçu dans les vidéos d’Hodinkee ou divers articles sur le Micro Artist Studio.
Crédit: https://www.seikowatches.com/global-en/special/tokinowaza/nakazawa/interview/
Shiohara san et Nakazawa san
Crédit: https://watchesbysjx.com/2011/12/28
Nakazawa san et une de ses disciples, Masuda san. Le relève est assurée. Quand on dit que le MAS est sous des escaliers, ça n’est pas une blague…
Crédit: https://deployant.com/inside-seiko-the-micro-artist-studio/
La rivalité
Seiko Watch Corp, chargée de formuler ses demandes à Suwa et Daini, a utilisé la séparation de ces deux entités pour mettre en place une forme de rivalité fraternelle, une saine émulation qui a permis de vraies évolutions et qui a poussé chaque entité à se dépasser systématiquement, rendant ainsi Seiko toujours plus compétitif et novateur. Bien que cette rivalité soit présentée ici sous forme de « duels », il faut bien voir qu’il s’agit de quelque chose de moins fixé que ça, plutôt d’une dynamique.
Cette rivalité est née dans les année 50 lorsque Suwa produit la Seiko Super.
Daini répond en 1955 avec la Unique, très semblable à la Super mais 0,3mm plus fine.
Suwa réplique en 1956 avec la Marvel, une des montres les plus importantes dans l’histoire de Seiko, marquant son entrée dans l’ère moderne. Son impact fut énorme, que ce soit par son succès commercial, son succès aux concours de chronométrie au Japon ou par les montres qu’elle inspira (Crown, Lord Marvel, Grand Seiko, Crown Chronograph…).
Voici quelques « duels » mémorables entre des montres produites par les deux rivaux.
Commençons avec un duo… de trois montres !
La Super est la première montre moderne que Seiko commercialise après la seconde guerre mondiale, en 1950.
En 1955, Daini répond avec la Unique, qui sera très vite éclipsée l’année par la Marvel de Suwa, une montre essentielle dans l’histoire de Seiko.
La Super de Suwa (sortie en 1950), première Seiko avec une seconde centrale
Credit: Chrono24
La Seiko Unique de Daini (1955)
Crédit: Catawiki
La Seiko Marvel de Suwa (1956), la montre qui signe l’entrée de Seiko dans une nouvelle ére.
Crédit: Ikigai Watches
Un des duels cruciaux de la fin des années 50 est celui qui oppose la Cronos de Daini (1958) et la Crown de Suwa (1959). Les deux seront également déclinés en version « Special ». La Cronos est en fait la réponse de Daini à la Marvel de Suwa. La Crown, évolution de la Marvel, est elle la réponse à la Cronos.
Une superbe Cronos Special de Daini. Le logo sur le cadran à 6h est le logo SD (pour Special Dial) qui indique des index en or massif.
Crédit: king-collector sur caroussel.sg
La Crown Special de Suwa, avec ici le logo Applique Dial à 6h
Crédit: watch_bar_by_awb sur Caroussel.sg
La rivalité de la Cronos et de la Crown va évoluer avec leurs descendantes: les King Seiko (1961) et Grand Seiko (1960)
La deuxième génération de KS et GS continue la rivalité entre Daini et Suwa avec la King Seiko 49999 et la Grand Seiko 43999
King Seiko 49999
Crédit: Kyotoya Pawn Shop https://tokei.blog/japanwatch/seiko/95738
Grand Seiko 43999
Crédit: Kyotoya Pawn Shop https://tokei.blog/japanwatch/seiko/103718
Après 1966, Daini et Suwa se mettent tout deux à produire des Grand Seiko et la rivalité continue avec leurs modèles Hi Beat respectifs sortis en 1968: la 45GS manuelle de Daini et la 61GS automatique de Suwa.
45GS de Daini
Crédit: Kyotoya Pawn Shop https://tokei.blog/japanwatch/seiko/104006
61GS de Suwa
Crédit: Kyotoya Pawn Shop https://tokei.blog/japanwatch/seiko/104283
Suwa VS Daini avec les versions or 18 carats de la 61GS et de la 45GS
Crédit: www.theseikoguy.com
Suwa et Daini produiront chacun leurs chronographes automatiques, avec la série 61 pour Suwa et la série 70 pour Daini.
La Baby Panda et la Panda de Suwa équipées du calibre 6138
Crédit: r3born sur Reddit
Quelques chronographes de Daini équipés du calibre 7018
Crédit: https://vintagewatchinc.com/seiko/7018-chronograph/
Suwa VS Daini
Crédit: https://vintagewatchinc.com/seiko/7018-chronograph/
Bien que ce soit Suwa qui ait commercialisé la toute première montre à quartz au monde, Daini était également dans la course. Les références de ces modèles montrent d’ailleurs bien la course entre les deux maisons. Pour la toute première génération de quartz, Suwa propose la 35SQ et Daini la 36SQ, puis les calibre 38 (Suwa) et 39 (Daini) pour la seconde génération. Ce seront les premiers quartz commercialisés de manière plus large.
La très rare 36SQ Calendar de Daini
Crédit: https://watchvietnam.vn/kien-thuc/luoc-su-hang-seiko-mot-cuoc-hanh-trinh-vi-dai-chuong-6-bai-2-het-chuong.html
La superbe Quartz Superior équipée du calibre 3883, le modèle le plus abouti de la famille 38.
La Seiko 39VFA de Daini avec son système de led clignotante assez unique en son genre.
Crédit: Kyotoya Pawn Shop https://tokei.blog/
Bien qu’il serait possible de continuer encore et encore sur les modèles qui incarnent le mieux la compétition entre ces deux entités, je vous propose de conclure sur deux Grand Seiko modernes qu’il serait évident de présenter ensemble pour imager la rivalité de ces deux maisons.
Les deux GS les plus emblématiques de cette concurrence fraternelle qui existe toujours depuis 70 ans sont la Snowflake de Seiko Epson (Suwa) et la Mont Iwate de SII (Daini).
La Snowflake, Spring Drive et titane, moderne et high tech, et la Mont Iwate, Hi Beat et boitier 44GS
Conclusion
Ce tour d’horizon devrait vous avoir donné une vue d’ensemble de la dynamique qui anime Suwa et Daini, ou Seiko Epson et Seiko Instrument Inc comme on les appelle aujourd’hui, ainsi qu’une idée des montres et des personnes qui incarnent le mieux ces deux entités à mon sens.
Comprendre la rivalité entre ces deux centres névralgiques de Seiko permet de mieux comprendre comment les montres sont faites et comment l’offre est compartimentée. Cette compréhension permet aussi de voir comment les deux manufactures se sont spécialisées avec le temps pour développer des caractéristiques assez spécifiques. Avec l’habitude, vous serez même en mesure de reconnaître d’où vient telle ou telle montre uniquement avec son design, les deux maisons ayant des identités propres qui se ressentent jusque dans les détails.
Mais l’histoire de Suwa et Daini ne se résume pas uniquement à une rivalité: en effet par le passé on a déjà vu à quelques rares occasion une collaboration entre Suwa et Daini, principalement avec les plongeuses des années 60/70 comme la 62MAS donc une partie des derniers modèles a été manufacturée chez Daini, comme ce fut le cas également pour la 6105-8000.
Au final, c’est Seiko Watch Corporation qui joue le rôle de chef d’orchestre et qui permet des synergies parfois nécessaires à ce que cette mécanique soit parfaitement huilée !
Vous savez donc maintenant exactement ce qui sépare et distingue Suwa et Daini et pourquoi les Grand Seiko modernes viennent de deux manufactures différentes, avec chacune leurs spécificités propres ! Ces deux maisons n’ont donc plus de secrets pour vous maintenant !
Crédit: www.grandseikoGS9club.com/history
Un grand merci à Andrea Secco de @TheSeikoGuy ou www.theseikoguy.com pour la magnifique photo utilisée en miniature et en bannière et les quelques photos empruntées. Je vous conseille de mettre directement son excellent site dans vos favoris !
Un grand merci également à Anthony Kable @akable de www.plus9time.com pour l’utilisation de toutes les illustrations, images et photos puisées sur son fabuleux site que je recommande très chaudement à tous les anglophones !
Sources:
https://www.plus9time.com
https://www.theseikoguy.com
https://www.watch-wiki.net/index.php?title=Seiko_35
https://www.watch-wiki.net/index.php?title=Seiko_36
https://www.watch-wiki.net/index.php?title=Seiko_38
https://www.watch-wiki.net/index.php?title=Seiko_39
https://www.seikowatches.com/fr-fr/special/tokinowaza/nakazawa/interview/
https://quillandpad.com/2020/09/13/seikos-secret-specialist-haute-horlogerie-micro-artist-division-in-japan/
https://museum.seiko.co.jp/en/seiko_history/milestone/milestone_06/
http://seiko.aydinsaat.com/world/tokinowaza/ito/interview/
https://global.epson.com/company/corporate_history/timeline/
https://global.epson.com/IR/library/integrated2019/vision/
https://www.plus9time.com/blog/2017/3/30/japan-winter-2017-trip
https://watchvietnam.vn/kien-thuc/luoc-su-hang-seiko-mot-cuoc-hanh-trinh-vi-dai-chuong-6-bai-2-het-chuong.html
https://www.watchonista.com/articles/history/history-quartz-weekend-part-1-seiko-revolution
http://www.shizukuishi-watch.com/eng/intro.html
https://www.plus9time.com/seiko-case-back-information/
The Seiko Book
The History of the Seiko 5 Sports Speed -Timer - Ryugo Sadat
Seiko - A journey in Time
Rattraper et dépasser la Suisse - Pierre-Yves Donzé
12 faces of time - Elizabeth Doerr
Grand Seiko : sculpter la lumière
Je vous propose de voir au travers de différents exemples issus de la culture nippone comment l'ombre et la lumière sont au cœur de la sensibilité esthétique Japonaise et comment cela se traduit dans le style de Grand Seiko.
Je crois que la chose qui alimente le plus ma passion pour l'horlogerie et plus particulièrement Grand Seiko, c'est tout ce que cette passion m'apporte en dehors des montres en elles-même: des rencontres, des découvertes, et tout un tas de choses qui me seraient probablement restées étrangères, ou du moins que je n'aurais pas vues avec le même regard.
Donc une fois de plus, je vais vous parler de Grand Seiko mais sans vous parler de montres.
Si l'esthétique des GS a longtemps laissé de marbre une grande partie des amateurs occidentaux d'horlogerie, ce n'est pas un hasard. "C'est bien fait mais c'est trop froid pour moi", "c'est trop chirurgical, ça ne me parle pas", "c'est tellement parfait que c'en est austère", combien de fois ai-je pu lire ce genre d'avis?
Avec le recul, je me rends compte aujourd'hui que c'est totalement normal. En étant entouré de productions japonaises depuis tout petit (films, dessins animés, jeux vidéos, voitures, habits et autres objets du quotidiens en tous genres), je sentais bien qu'ils n'avaient pas les mêmes goûts que nous, occidentaux. Mais ça va beaucoup plus loin: ils n'ont tout simplement pas le même concept du beau et l'esthétisme Japonais est très loin du nôtre.
J'ai déjà effleuré la surface de cette question dans un des premiers articles de ce blog, mais j'aimerais ici revenir sur une des caractéristiques essentielles de l'esthétique japonaise: la lumière, ou plutôt l'ombre, elle qui à l'image des coups de burin du sculpteur sur le marbre vient sculpter la lumière.
Alors j’entends déjà les plus cartésiens d'entre vous argumenter "l'ombre n'est que l'absence de lumière, elle ne peut donc pas la sculpter". Bon, OK, c'est vrai. Mais l'ombre est un outil important qu'utilisent les designers et autres artistes Japonais pour mettre en valeur la lumière, et ce depuis très longtemps. Et puis merde, laissez moi profiter de mes envolées lyriques !
Je vous propose donc de voir au travers de différents exemples issus de la culture nippone comment l'ombre et la lumière sont au cœur de la sensibilité esthétique Japonaise et comment cela se traduit dans le style de Grand Seiko.
Eloge de l'ombre, Junichiro Tanizaki
Junichiro Tanizaki
Ouvrage d'un autre temps, ce court traité date d'une période marquée par l'occidentalisation du Japon au début du XXeme siècle. L'auteur y compare différents éléments d'architecture, des objets de la vie quotidienne, les matières employées etc, et met en évidence les différences entre les sensibilités esthétiques occidentale et japonaise, qui selon lui se ressentent le plus fortement dans l'usage de l'ombre. Là où la culture occidentale n'est que lumière, lustre et brillance, Tanizaki ressent plus d'émotion à observer les reflets discrets d'un bol en laque urushi dans une pièce obscure éclairée d'une simple bougie. À la blancheur pérenne de la faïence occidentale il préfère sa cabane - ombragée, vous l'aurez compris - au fond du jardin (ce passage sur les lieux d'aisance étant d'ailleurs particulièrement cocasse et exquis).
Tanizaki et un concitoyen occidentalisé
Il est intéressant de voir le choc culturel qu'a apporté l'électricité au Japon et il est facile de comprendre comment Tanizaki, issu d'une famille aisée très traditionnelle de Tokyo, a pu être perturbé par la transformation radicale du Japon de l’ère Meiji. Cela nous permet à la fois de discerner ce sens de l'esthétique plus traditionnel et ancestral dont a hérité l'auteur, mais aussi de voir que cette sensibilité n'a cessé d'évoluer depuis un siècle, entre autres avec l'influence de l'occident.
Au travers des exemples donnés par l'auteur, le lecteur peut mieux apprécier certains concepts anciens comme le sabi, tout en constatant un certain côté désuet de la sensibilité de Tanizaki s'il repense aux néons du Shinjuku de nos jours ou aux toilettes japonaises futuristes.
Mais pour autant, ce ne sont pas les exemples modernes qui manquent pour mettre en lumière cette sensibilité esthétique japonaise dont il est question depuis le début. Et s'il est un cliché éculé sur le Japon, c'est bien celui du fameux "contraste entre tradition et modernité". Décidément tout n'est que contraste et nuances… Un contraste cette fois-ci culturel qui marque les occidentaux mais qui fait partie intégrante de la vie quotidienne au Japon ! Mais on s'éloigne du sujet…
Voyons comment l'ombre et la lumière se retrouvent dans différents aspects de la culture Japonaise moderne. Que dirait Tanizaki s'il était encore de ce monde ?
Lumière, ombre et forme : Tadao Ando et la maison Koshino
Tadao Ando
Je ne vais pas essayer de me faire passer pour un connaisseur en matière d’architecture, mais parmi le peu de choses que je connais à ce sujet, il y a la sensibilité particulière de l’architecte Japonais mondialement connu Tadao Ando pour l’ombre et la lumière.
Je vous propose donc un extrait de son livre “La maison Koshino”
“La lumière confère une existence aux objets en reliant l’espace et la forme. Un rayon de lumière, isolé au sein du bâtiment, s’attarde sur la surface des objets et fait naître l’ombre en arrière-plan. Avec le passage du temps et la succession des saisons, l’intensité de la lumière varie, et dans son silage les caractéristiques des objets. Simultanément, la lumière, isolée et happée par les objets, est ainsi objectivée et prend forme. La position de tous les objets est définie par leur relation les uns par rapport aux autres. Au moment où l’on fixe une relation mouvante de ce type, l’ensemble des relations est ainsi déterminé. À la frontière entre la lumière, fulgurante dans son rayonnement comme dans son extinction, et l’obscurité, un objet s’articule et prend forme. [...]
La maison koshino
Dans l’architecture japonaise, les liens entre les différents espaces et les motifs compilés nés de la lumière étaient très importants. Par le biais de la lumière changeant au fil du temps, une architecture porteuse d’une relation de réciprocité entre ses parties se constituait. C’est en arrière-plan de cette évolution que se dégage la conception particulière de la pensée orientale zen, selon laquelle “l’espace n’est que néant, ce quelque chose qui apparaît à la frontière où les objets disparaissent”. De même, dans l’architecture japonaise, le pavillon de thé est un univers réduit au minimum qui témoigne de cette frontière, dans ses dimensions comme dans son expression. Une personne assise et méditant peut y ressentir une sensation d’espace illimité, par l’interaction de la lumière et de l’obscurité.”
La maison koshino
De manière très intéressante, Tadao Ando en vient à parler de la façon dont la culture occidentale est venue influencer la culture Japonaise, en s’inscrivant donc dans la lignée directe de l’ouvrage de Tanizaki. Voici ce que dit l’architecte à ce sujet:
“L’imbrication entre Orient et Occident, que je retrouve en moi, témoigne de la structure de la culture japonaise. Le Japon a crée une culture originale en important et en intégrant des éléments d’autres pays. Cependant, de nos jours, notre spécificité est en train de disparaître. Je pense que le temps est venu de porter un nouveau regard sur la culture japonaise traditionnelle tout en permettant son interaction avec la culture occidentale. Le Japon contemporain a perdu, selon moi, deux valeurs importantes : le richesse dont l’ombre est porteuse et le sens de la profondeur. L’ombre ayant disparu de la conscience, les délicats motifs nés de l’ombre et de la lumière, tout comme les résonances de l’espace appartiennent à un passé révolu. Entièrement éclairés de manière homogène, les objets et les formes sont emprisonnés dans une relation unitaire. Il me paraît donc nécessaire de revenir à la richesse que nous offre l’espace.”
La maison koshino
Un extrait plus long est disponible ici si le sujet vous intéresse: http://www.articule.net/2019/11/26/lumiere-ombre-et-forme/
Tadao Ando rejoint donc très clairement l’avis de Tanizaki et les deux auteurs déplorent, chacun à leur époque, une lumière omniprésente et homogène qui casse les nuances et subtilités des clairs obscures Japonais.
On peut également noter que Tadao Ando cite tout de suite le pavillon de thé lorsqu’il parle de l’architecture Japonaise. En effet, la cérémonie du thé et tout ce qui gravite autour sont considérés comme centraux dans la construction de l’esthétique Japonaise. Tanizaki parle d’ailleurs longuement du tokonoma, cette petite alcôve surélevée typique de l’architecture Japonaise où l’hôte peut mettre en avant de la calligraphie, de l’ikebana (arrangement floral) ou autres objets d’art. Jouant un rôle très important dans la cérémonie du thé, Tanizaki voit dans ce détail architectural et artistique la quintessence même de l’esthétique Japonaise.
Le tokonoma, cette alcove typique de l’architecture japonaise qui renferme pour Tanizaki toute la sensibilité japonaise
Kenta Anzai : sculpter la lumière
Source: https://www.vogue.com/slideshow/design-trip-to-tokyo
Je l’avoue sans peine, le titre grandiose de cet article a été pompé d’un autre article tiré de l’excellent magazine Tempura que je ne peux que vous conseiller si la culture japonaise vous intéresse. Ce très bon article dresse le portrait de l’un des céramistes japonais les plus en vogue: Kenta Anzai.
Ce jeune artiste du nord du Japon travaille de manière très intéressante, en mêlant un peu de laque urushi à son argile qui prend donc une couleur noire. Il travaille ensuite longuement la texture de ses céramique afin de leur donner une sorte de patine subtile et élégante. On peut y voir une évocation du temps qui passe, concept central de l’esthétique japonaise héritée du bouddhisme que l’on retrouve dans le fameux wabi sabi.
« Au fond de l’atelier, il entrepose les pièces qu’il vient de finaliser et qui attendent d’être exposées. Vases, soliflores, coupes à sake, amphores… Des formes simplest aux courbes élégantes. Mais ce qui distingue sans doute le style de l’artiste de Koriyama, c’est ce polissage noir, fruit de plusieurs années de recherche et tentatives. Après la cuisson, l’artiste applique une couche d’argile noire, qu’il fait adhérer à la pièce avec de l’urushi, la laque traditionnelle qui lui sert de colle. Puis il laisse sécher la pièce et la polit avec du papier de verre. Il répète ce processus 8 à 10 fois. Ce qui fait qu’entre la cuisson et le résultat final, il peut s’écouler deux mois.
Source: https://suzannelovellinc.com/blog/kenta-anzai/
[...]
Nombreux sont les artistes qui revendiquent un avant et un après 11 Mars 2011 (séisme et raz de marée qui ont frappé le Japon).
« Avant la catastrophe, j’accordais une très grande importance à la technique, j’essayais de me démarquer par là. Après le tremblement de terre, j’ai eu beaucoup de temps libre. J’ai fréquenté les musées, j’ai eu le temps de réfléchir au type de céramiste que je voulais devenir. Je suis allée voir une exposition du peintre français Georges Rouault. En voyant la photo sur le ticket de l’expo, je me souviens d’être dit « qu’est-ce que c’est que ces dessins d’enfant? ». Mais en découvrant ses œuvres en vrai, j’ai été frappé par leur force. Il se dégageait une puissance de ses peintures. » C’est cette même puissance que Kenta Anzai s’efforce alors de chercher, et qu’il retrouve chez des artistes tels que Giacometti. C’est rai qu’il y a quelque chose de l’artiste suisse chez le céramiste japonais, notamment dans ses soliflores noirs filiformes. Une simplicité presque primaire, qu’on ne saurait situer dans un courant particulier tant elle s’inscrit plus dans l’espace que le temps. Une forme élégante, pure mais imparfaite, composée d’irrégularités, d’aspérités quasi organiques. Et ce noir profond qui boit la lumière.
Source: https://suzannelovellinc.com/blog/kenta-anzai/
[...]
« J’ai grandi dans un logement HLM vétuste jusqu’à mes 10 ans, je me souviens que je prenais mon bain sur le balcon à la tombée du jour, et qu’ensuite nous allions nous balader entre les immeubles sur le dos de ma mère. J’ai encore le souvenir de lumières qui passaient à travers les fenêtres le soir. Ma définition de la beauté vient de ces paysages de mon enfance, de ces lumières, de ces reflets dans le soir mourant. Cela m’a constitué. (...) J’aimerais retrouver cette lumière. »
Les œuvres de Anzai personnifient magnifiquement ces jeux d'ombre et de lumière, ces contrastes si omniprésents dans la culture japonaise. Il en deviendrait presque difficile de savoir si la lumière met en valeur ses pièces ou si ce sont ses œuvres qui viennent sculpter la lumière qui les entoure.
Source: https://suzannelovellinc.com/blog/kenta-anzai/
La lumière et le “ma”
Pour une fois, le ma est un concept japonais relativement facile à comprendre, du moins de prime abord. Le caractère qui correspond au ma est celui que l’on pourrait traduire en français par l’intervalle ou l’espace entre deux choses, le vide qui unit. Cet idéogramme représente un soleil entouré d’une porte. Wikipédia le définit comme le vide qui relie deux objets, mais il me semble important d’apporter une nuance. Le vide n’est pas ici synonyme du néant mais au contraire de la relation qui existe dans ce qui sépare deux objets.
Dans le théâtre Nô, le ma sera le silence qui permet de laisser la réplique porter. Dans la cérémonie du thé, ô combien essentielle dans l’esthétique Japonaise, la disposition des ustensiles et leur arrangement dans l’espace sont une autre dimension du ma. Dans l’ikebana, l’art de l’arrangement flora, « ce qui est produit, c’est la circulation de l’air, dont les fleurs, les feuilles, les branches (mots beaucoup trop botaniques) ne sont en somme que les parois, les couloirs, les chicanes, délicatement tracés selon l’idée d’une rareté… » (Roland Barthes, L’empire des signes). Les fleurs ne font ici que sculpter l’espace, le ma qui les entoure.
C’est évidemment cette idée-là que Tadao Ando développe dans l’extrait cité plus haut.
« La lumière confère une existence aux objets en reliant l’espace et la forme. Un rayon de lumière, isolé au sein du bâtiment, s’attarde sur la surface des objets et fait naître l’ombre en arrière-plan ».
Cette beauté que voyait Tanizuki dans l’ombre n’est-elle pas celle des rapports changeants qu’entretiennent la lumière et son absence? Cette matérialisation du ma? De ces subtilités et de ces changements peut également naître le yugen, cette beauté mystérieuse et ce charme subtil qui naissent de la grâce du non-dit, du suggéré.
Finalement, ces différentes dimensions de l’esthétique japonaise se rattachent à autant d’émotions que l’on peut ressentir en flânant dans un jardin japonais, en admirant un spectacle de geisha, en se perdant dans les vieilles rues de Kyoto à la tombée du jour ou dans la simplicité apparente d’un poème haiku dépouillé. Le visible et le suggéré, le brillant et le mat, les mots et le silence, le sucré et l’amer, la lumière et l’ombre… Tant de nuances, d’oppositions qui s’équilibrent. Et finalement dans ces contrastes se cache un peu de l’âme du Japon.
Source: https://shoottokyo.com/blog/geisha-gion
Conclusion
J’espère que ces quelques notions se rattachant à l’esthétique Japonaise vous feront mieux apprécier les jeux d’ombre et de lumière qui font l’essence même de la Grammaire du Design si chère à Taro Tanaka. J’espère également que vous comprendrez un peu mieux pourquoi le zaratsu n’est pas qu’une simple technique de polissage, héritée de machine Allemandes, mais un moyen de “sculpter la lumière” au travers de contrastes et de nuances afin d’exprimer cette sensibilité esthétique toute Japonaise. Alors vous porterez peut-être un regard différent sur ces créations.
L’histoire des Seiko 5
Seiko 5 est peut être la gamme la plus populaire de l’histoire de Seko mais c’est aussi une de celles dont on parle le moins quand on se plonge dans le passé de la marque. Et pourtant, l’histoire de cette gamme très sous-estimée est vraiment passionnante et n’a rien à envier aux autres grands noms de la marque. Voyons ça ensemble d’un peu plus près…
Credit: Anthony Kable www.plus9time.com
Introduction
Les Seiko 5 font partie des modèles de la firme Tokyoïte les plus connus. Nombreux sont les amateurs de montres ayant découvert l’horlogerie grâce à un de ces modèles aussi abordable que robuste et fiable.
Les Seiko 5 ont aujourd’hui cette réputation qui leur colle au boîtier: ce sont des montres cheap qui permettent de découvrir les joies des montres mécaniques pour quelques dizaines ou centaines d’euros.
Pourtant, il se cache derrière cet écusson une histoire bien plus intéressante qu’il n’y paraît… Une histoire qui remonte au début des années 60 et nous amènera à redécouvrir certains des plus grands moments de la marque !
Je pense qu’on peut dire que la gamme Seiko 5 est clairement une des plus importantes dans l’histoire de la marque et qu’elle a changé celle-ci en profondeur et de manière extrêmement significative.
Voyons tout ça d’un peu plus près…
Un pédigrée de haut vol
Voici une question qui en surprendra peut-être quelques-uns: quel est le point commun entre Seiko 5 et Grand Seiko?
Ces deux gammes incontournables et aujourd’hui aux antipodes de ce que propose la marque sont le fruit du travail conjoint des trois plus grands noms de l’histoire moderne de Seiko: Taro Tanaka, son mentor Ren Tanaka et Tsuneya Nakamura.
Taro Tanaka est connu pour sa grammaire du design utilisée chez Grand Seiko, mais son impact sur la marque est bien plus important que ça. Il a participé à de nombreux grands projets que ce soit en tant que designer des Seiko 5, mais aussi en tant qu’instigateur du “standard millimétrique” ou que père des mythiques plongeuses Seiko.
Son mentor Ren Tanaka a participé à faire basculer Seiko dans une ère moderne que ce soit via son intérêt pour le marketing à l’occidentale (qui débouchera sur les Disney Time puis les Seiko 5) ou son implication dans le service client ou d’autres projets de l’ombre . C’est entre autre à lui que l’on doit les noms de King Seiko et Grand Seiko, ou encore le logo et les couleurs de Seiko, encore utilisés aujourd’hui.
Tsuneya Nakamura est le père de la Marvel, de la Gyro Marvel, du calibre de la première Grand Seiko, il a participé et encadré les équipes de Suwa Seikosha aux concours de chronométrie de Neuchatel et Genève et il fut également impliqué dans le développement du mythique mouvement à quartz de l’Astron avant de devenir président de Suwa Seikosha. Un autre monument de Seiko.
Mais parmi les faits d’armes les plus glorieux de ces trois hommes, la création des Seiko 5 tient une place très importante tant son impact fut majeur !
Ren Tanaka: le point de départ et le marketing
Le concept même des Seiko 5 est né dans l’esprit génial de Ren Tanaka, un passionné de marketing à une époque où celui-ci n’existait simplement pas au Japon. Après avoir créé la gamme Disney Time, une petite révolution marketing qui avait pour but de « planter la graine » de Seiko dans la tête des bambins Japonais pour en faire les clients de demain, il crée un produit pensé pour les jeunes Japonais mais également les jeunes du monde entier: les Seiko Sportsmatic 5.
Credit: The Horological International Correspondance
Il faut comprendre que dans les années 50, Seiko fabriquait des produits et se souciait ensuite de comment faire pour les vendre, de manière plus ou moins habile. Ren Tanaka, en découvrant le marketing, se rend compte qu’il serait plus intéressant de faire l’inverse: faire des produits qui se vendent et pour ça, il faut répondre à une demande. Ca n’est plus au client de trouver un produit qui lui plait dans l’offre de la marque, c’est à la marque de s’adapter à ce que veulent les clients. Cela peut sembler anecdotique mais c’est un vrai changement de paradigme pour la marque !
C’est dans cette optique qu’il décide de créer une gamme de montres abordables,modernes et destinées aux jeunes. Par nécessité de rester abordables, ce sera donc un produit de masse. Mais le souhait dès le début est également d’en faire une gamme internationale. Elles seront commercialisées d’abord au Japon à partir de Septembre 1963, soit un an avant les JO de Tokyo, un événement d’ampleur planétaire qui verra des dizaines de milliers d’étrangers débarquer au Japon. C’est l’opportunité rêvée pour pour lancer la première gamme internationale de la marque, qui profitera de la visibilité qu’offre l’évènement à Seiko, puisque la marque s’avère être le chronométreur officiel de la compétition ! Que demander de mieux comme publicité ?
La première « Five » sort donc en Septembre 1963 avec le nom Sportsmatic 5 et signe le début d’une grande aventure et d’un succès encore jamais atteint par la marque jusqu’à présent.
Tsuneya Nakamura: le mouvement
La conception du mouvement sera confiée à Tsuneya Nakamura et à ses équipes de Suwa Seikosha. Au début des années 60, le remontage automatique est synonyme de modernité et fait partie des attributs obligatoire d’une Seiko 5. Nakamura étant le créateur de la mythique Gyro Marvel et de tous les succès de Seiko depuis l’après-guerre, il semble normal de lui confier à nouveau ce challenge. En tant que responsable du développement des calibres de Suwa Seikosha, il crée le calibre 410 qu’il envoie aux designers de K Hattori à Tokyo, dont l’équipe est dirigée par Taro Tanaka.
Tsuneya Nakamura in 1969. Source: Anthony Kable www.plus9time.com
Le calibre 410 n’était pas un mouvement bas de gamme mais plutôt un mouvement automatique relativement fin qui propose le jour et la date, généreusement empierré de 21 rubis, pour un rapport qualité/prix excellent. À sa sortie, il est clairement supérieur aux mouvements entrée de gamme de la marque dont il est l’évolution. En effet, il s’agit de l’évolution du calibre 436 que l’on retrouve dans les Sportsman 17 et il est très proche du calibre 245 de la Sportsmatic.
Extrait de The Horological International Correspondance
Les équipes de Suwa Seikosha envoient donc ce nouveau calibre 410 à Taro Tanaka qui travaillera avec eux d’arrache pied pour mettre au point le calibre qui répondra aux besoins de cette nouvelle gamme.
Taro Tanaka: le design
Le jour et la date dans un guichet unique: un vrai casse-tête
C’est là qu’entre en jeu le fameux designer. Le mouvement qu’il reçoit de Suwa propose la date à 3h et le jour à 6h dans une large fenêtre rectangulaire, dans le style des Seikomatic Weekdater. Mais voilà, Taro Tanaka ne trouve pas la lecture des informations très ergonomique. En effet, de la même manière qu’il est utile d’avoir les heures, les minutes et les secondes sur le même axe afin de lire ces trois informations d’un seul coup d’œil, il considère que le jour et la date devraient être lus d’un seul coup d’œil en apparaissant dans une large guichet unique à 3h, une caractéristique alors jamais vue sur aucune montre que ce soit et qui deviendra une signature des Seiko 5.
À cette époque, rares sont les montres dites « daydate » qui proposent l’affichage du jour de la semaine et de la date. L’exemple le plus connu est celui de la Rolex Daydate avec son fameux guichet de jour à 12h et sa date à 3h. D’autres proposent le jour à 6h.
Une idée vient alors à l’esprit de Taro Tanaka.
En Japonais, les jours de la semaines sont composés de trois caractères (ou kanji), le premier étant celui d’un « élément » (le feu, l’eau, le bois, le sol etc), les deux autres signifiant tout simplement « jour de la semaine ». Par exemple lundi se dit littéralement « jour de la lune », comme Monday en anglais, et s’écrit 月曜日, mardi 火曜日 (jour du feu), 水曜日 pour mercredi (jour de l’eau) etc. Puisque tous les jours de la semaine finissent par les kanji 曜日, il lui suffit d’afficher le premier kanji pour comprendre en un coup d’oeil quel jour nous sommes, 月 pour lundi, 火 pour mardi, 水 pour mercredi etc. Cette idée réduit énormément la taille nécessaire pour afficher le jour et permet donc de le faire apparaître de manière très lisible à côté de la date.
Ces montres étant pensées pour le marché international, il faut ensuite trouver comment indiquer le jour en anglais. À l’image du Japonais, les jours en Anglais finissent tous par DAY, il suffit donc d’afficher les premières lettres pour comprendre facilement le jour de la semaine, MON pour Monday, TUE pour Tuesday, WED pour Wednesday etc.
C’est donc à Taro Tanaka que l’on doit cet affichage simple et efficace, très largement répandu aujourd’hui et développé à l’origine pour les Seiko 5 !
Un autre soucis occupe l’esprit de Taro Tanaka: il y a un espace entre le disque des jours et celui de la date qui ne peut être réduit et qui est du plus mauvais effet. La solution la plus probante sera de mettre le disque de date en noir, ce qui permet de ne plus voir l’écart entre les deux disques !
Cet affichage ultra pratique et ergonomique est vraiment unique et de manière générale il existe peu de montre day-date à l’époque, y compris en Suisse, et Taro Tanaka commence la paperasse et le dossier pour le bureau des brevets, mais les dirigeants de l’époque estiment que ce brevet doit déjà avoir été déposé en Suisse et ne veulent pas prendre le risque de se ridiculiser en proposant un brevet déjà existant. Taro Tanaka fait ses recherches et insiste: ce système ne semble vraiment pas exister en Suisse et le brevet serait un argument intéressant pour les Seiko 5. Les dirigeants lui demandent fermement de ne rien faire, prétextant que ce sont les performance et le côté cool des montres qui font vendre, pas les brevets…
Ironiquement, avec le succès des Seiko 5 et de l’intérêt que suscitait ce guichet unique pour le jour et la date, beaucoup de personnes demandèrent par la suite à Tanaka pourquoi il n’avait pas fait breveté son design… Même des années après, il est facile de sentir l’amertume de Taro Tanaka à la lecture de ses explications !
Le reste du design extérieur comprend trois autres points essentiels: l’étanchéité, indispensable à une montre moderne pensée pour les jeunes, la couronne à 4h et le bracelet en métal.
L’étanchéité et le standard millimétrique
Au début des années 60, l’étanchéité reste quelque chose d'encore assez peu répandu et il était ancré dans l’inconscient collectif qu’une montre craint l’humidité et l’eau, d’autant plus dans un pays comme le Japon. Les montres vraiment étanches étaient souvent assez épaisses et associés à des usages spécifiques, mais la plupart des montres de la vie de tous les jours n’étaient pas vraiment étanches.
Cette étanchéité fut rendue possible grâce à un travail phénoménal de Taro Tanaka que l’on appelle le standard millimétrique ou standard extérieur.
En effet, lorsque Tanaka rejoint Seiko à la fin des années 50, ils utilisent encore la ligne, unité de mesure de l’Ancien Empire, dont la plus petite division fait 0,564mm.
Pourtant à ce moment-là, les fabricants de cadrans et de boîtiers travaillent déjà avec le millimètre et avec une marge d’erreur de l’ordre de 0,05mm. Comme le design des montres s’avère très approximatif dans les dimensions, le travail avec les fabricants de cadrans et boitiers est très difficile et surtout il est compliqué d’avoir un ajustement précis entre les pièces et donc une étanchéité réelle.
Le tableau qu’utilisent les designers de Seiko avant Taro Tanaka
Credit: The Horological International Correspondance nº427 - 1995
En oubliant la ligne et en imposant le millimètre comme mesure dans le design des montres, il permet d’améliorer grandement la conception des montres et d’avoir enfin des montres vraiment étanches en réduisant les espaces inutiles et en utilisant des joints d’étanchéité, une vraie révolution pour Seiko. Ce travail sur le standard millimétrique et la conception des premiers boîtiers de Seiko 5 est mené avec Hayashi Seiki Seizo, fabricant de boîtiers appartenant en partie à Seiko et fondé par un ancien employé de Daini Seikosha au début du XXème siècle.
Les Seiko 5 allaient bien être des montres day-date automatiques, étanches et fines, une vraie innovation pour l’époque !
La couronne à 4h
La couronne à 4h est une signature des premières montres mécaniques comme les Seikomatic, qui souligne le fait qu’il ne soit pas nécessaire de remonter la montre manuellement. C’était vraiment quelque chose d’exceptionnel puisqu’il n’existait pas en Suisse à cette époque une montre automatique, qui soit également fine et abordable. C’était donc une caractéristique centrale de ces montres que le design devait mettre en valeur.
Malheureusement ce fut également la raison de nombreuses plaintes, puisqu’il était difficile de régler le jour et la date à l’aide de cette toute petite couronne bien planquée. Le design de cette petite couronne est repris des Seikomatic qui ne proposent ni jour ni date et avec lesquelles on manipule donc assez peu la couronne. Mais ce n’est pas le cas des Sportsmatic 5. Si la montre s’arrête, il faut faire tourner les aiguilles jusqu’à avoir réglé correctement le jour et la date, ce qui peut s’avérer long et fastidieux. Les plaintes venaient d’ailleurs majoritairement de vendeurs qui devaient d’abord secouer la montre un moment pour la remonter (pas de remontage manuel), puis la mettre à l’heure avant de la remettre au client.
Taro Tanaka dût vite trouver une solution de dépannage. Il trouva des petits tubes de plastique d’un centimètre de long qui faisaient exactement la bonne taille pour aller sur les couronnes et Seiko les distribua aux revendeurs. Cette solution étant plus un bricolage qu’autre chose, le défaut de la couronne fut réglé par la suite, que ce soit avec des couronnes plus faciles à manipuler ou avec de nouvelles fonctions implémentées dans les nouveaux calibres des générations suivantes.
Le bracelet métal
Enfin le bracelet en métal. Jusque là, toutes les Seiko (et la majorité des montres du marché) étaient offertes sur des bracelets en cuir, voir éventuellement sur des bracelets synthétiques (type nylon/nato). Mais les Seiko 5 étant étanches, le cuir n’était pas adapté et il fallait un bracelet en métal par soucis de durabilité. Cependant à l’époque les bracelets n’étaient pas en acier comme aujourd’hui et globalement d’assez mauvaise qualité. Seiko travailla donc d’arrache pied avec leur fabriquant de bracelets (qui semblerait s’appeler Piano si on en croit la gravure du fermoir d’origine) pour proposer un modèle en acier et de bonne facture, symbole de modernité, de robustesse et d’étanchéité pour la montre.
Brochure de l’été 1964
Credit: www.theseikoguy.com
Les Seiko 5 de cette période seront donc toutes équipées de bracelets en métal aux designs souvent assez spécifiques.
Le résultat de ce travail est un design que Taro Tanaka considère aujourd’hui encore comme son design le plus réussi, qui lui valut d’ailleurs le premier Good Design Award remporté par Seiko. Il s’agissait tout simplement de la première montre au monde à recevoir ce titre.
Un futur collector incontournable
Les Seiko 5 sont donc nées du talent et de la passion pour le marketing du brillant chef de produit Ren Tanaka, du génie du design du grand Taro Tanaka, d’un calibre créé par le meilleur concepteur de mouvement de la marque Tsuneya Nakamura. Ces montres font partie des premières montres automatiques créées après les Gyro Marvel (à l’instar des Seikomatic), des premières montres réellement étanches de Seiko grace au standard millimétrique, lancées avec en ligne de mire les fameux JO de Tokyo en 1964. Avec un tel pédigrée, il est étonnant que ces montres ne soient pas encore des collector ultra demandés !
Les 5 caractéristiques des Seiko 5?
On entend souvent que le 5 des Seiko 5 vient des 5 caractéristiques que doivent avoir ces montres. Seulement voilà, on trouve plein de versions différentes de ce que sont ces 5 « valeurs ».
En fait ce nom fut donné par Ren Tanaka lui-même qui trouvait qu’il donnait un côté jeune et dynamique et il souhaitait utiliser un chiffre impair pour ces mêmes raisons. Un nom anglais (prononcé “five” y compris en Japonais), facile à prononcer et signature de la première gamme de la marque conçue aussi bien pour le marché interne qu’international, ça n’est pas rien et c’est une première pour Seiko !
Les caractéristiques principales nécessaires aux Seiko 5 étaient assez évidentes dès le début (mouvement automatique, jour et date dans un même guichet, étanchéité) mais n’ont pas eu d’impact dans le choix du nom de la gamme.
L’idée de raccrocher à ce nom 5 « valeurs » ou caractéristiques est une idée purement marketing développée dans un second temps.
Le site actuel des Seiko 5 Sports liste ces 5 points:
Remontage automatique
Jour et date dans un guichet unique
Etanchéité
Couronne en retrait à 4h
Boîtier et bracelet durables
Mais dans le numéro de Septembre 1963 de Seiko News, on peut lire une version différente:
Remontage automatique
Jour et date dans un guichet unique
Étanchéité
Un design au charme virile (oui oui)
L’usage raisonnable de rubis (synonyme de montre de qualité, symbole à l’époque de robustesse et de fiabilité).
Même dans les publications de Seiko de l’époque, ces caractéristiques changent. Aujourd’hui on lit d’autres choses comme l’utilisation du Diaflex (alliage spécial pour le ressort de barillet) ou du Diashock , le système antichoc de Seiko. Il existe plein d’interprétations différentes. Wikipédia par exemple cite comme premier point le fait de donner l’heure (utile pour une montre), d’autres séparent le jour et la date en deux critères différents pendant que d’autres parlent simplement de robustesse...
Au final, ça n’est pas bien important puisqu’il s’agit ni plus ni moins qu’un argument commercial et qu’on comprend aisément que les Seiko 5 sont dans tous les cas des montres daydate automatiques, étanches et robustes.
L’évolution de Seiko 5
Première génération
Seiko Sportsmatic 5
Lors de sa sortie en 1963, les 5 s’appellent d’abord les Sportsmatic 5. Elles se distinguent des Seikomatic qui sont une autre famille de montres automatiques nées un peu avant et dont le mouvement de base diffère.
Les Sportsmatic 5 viennent de la famille « Sports » avec les Sportsman, Sportsman 7, Sportsman 17, Sports Lady, Sports Lady 17 et sont l’évolution (ou du moins les proches cousines) des Sportsmatic sorties peu avant.
Les premières Sportsmatic 5 utilisent les anciennes références qui commencent par J et la taille du mouvement en Lignes, soit la J13081 pour le premier modèle. Comme expliqué plus haut, la Ligne fut vite abandonnée et donc ces références aussi. La J13081 devient donc très vite la 41897, dont le 41 vient de la référence du calibre 410. La 41897 existe en 3 déclinaisons: boîtier plaqué acier et cadran argenté ou cadran gris anthracite, et boîtier plaqué or avec cadran argenté et aiguilles et index dorés. Il existe également une version plus rare, la 41898 avec boîtier plaqué or, cadran doré et réhaut noir.
Brochure de Noel 1964
Cette première génération a donc quelques caractéristiques spécifiques que vous pourrez facilement identifier:
Un logo peint à 12h avec la toupie (dérivée du logo Gyro Marvel), Seiko Sportsmatic puis le blason avec le 5
À 6h la mention WATERPROOF, Diashock 21 Jewels et enfin le fameux logo Applique Dial (que l’on retrouve uniquement sur cette première génération)
Le calibre 410, donc pas de référence commençant par 6606 ou 6619 (bien qu’il semble exister des modèles de transition avec le cadran AD et la référence 6606-8970)
Ces montres étaient étanches, sans préciser la profondeur. Ce ne sont clairement pas des montres pour plonger mais elles faisaient partie des montres présentées dans les campagnes d’été sur les montres étanches et cette caractéristique était souvent mise en avant dans la communication de la marque.
Le prix
À sa sortie, cette première génération de Sportsmatic 5 coûte entre 8,000 et 9,800 yens.
Pour comparaison, la Seikomatic Slimdater coûte environ 13,000 yens et la 57GSS coûte 27,000 yens (cf catalogue
Brochure de Noel 1964
À partir de Décembre 1964, le calibre 410 devient le calibre 6606, ainsi que son évolution le 6619 très peu de temps après. L’évolution principale apportée par le 6619 est l’ajout d’un push date, soit la possibilité de changer la date par une pression sur la couronne, une caractéristique rajoutée pour répondre aux plaintes des vendeurs dont on a parlé un peu plus tôt.
Il s’agit du premier modèle de Seiko équipé de cette fonction très pratique.
Résumé
Il existe deux types de Sportsmatic 5:
Les Sportsmatic 5 équipées du calibre 410 référence J13081 ou 41897/41898, commercialisées de Septembre 1963 à Décembre 1964, remplacées par les modèles équipés du calibre 6606.
Les Sportsmatic 5 équipées du calibre 6619 push date, sorti en 1965.
Ces montres seront commercialisées jusqu’en Juillet 1967.
Seiko Sportsmatic 5 Deluxe
Dès Mai 1964, Daini Seikosha sort une gamme légèrement supérieure aux classiques Sportsmatic 5, les Sportsmatic 5 Deluxe, avec un boîtier en acier massif cette fois-ci. Ces modèles ont un logo appliqué à 12h et utilisent le calibre 7606. Ce calibre descend directement du calibre de la Fairway (calibre 761), qui deviendra celui des Champion 850 et des Sportsmatic calendar 820. Le calibre 820 sera renommé calibre 7625 (par rapport à sa filiation au 761 de la Fairway). C’est sur ce 7625 (équipé seulement de la date) que sont basés les 7606. La fonction push date est maintenant assurée par un bouton-poussoir situé à 3h, séparé donc de la couronne. On a affaire à un produit de gamme intermédiaire, amélioration de la première génération de Sportsmatic 5.
Daini proposera ensuite une version équipée du 7619 qui proposent en plus le stop-seconde. Il s’agit là des Seiko 5 première génération les plus abouties.
Encore une fois, le fait que Daini sorte un produit légèrement au-dessus de celui de Suwa en terme de gamme montre bien la rivalité qui anime les deux centres de productions de Seiko !
Les prix
Les Sportsmatic 5 Deluxe se vendent entre 9,800 et 12,000 yens et les version équipées du 7619 se négocient elles entre 10,500 et 12,500 yens.
Brochure Été 1965
Résumé
Il existe deux types de Sportsmatic 5 Deluxe:
Les Sportsmatic 5 Deluxe équipées du calibre 7606 et disponibles de Décembre 1964 à Juillet 1967
Les Sportsmatic 5 Deluxe équipées du calibre 7619 et disponible de 1965 à Juillet 1967
Cette période allant de 1963 à mi-1967 marque la première ère des Seiko 5 avec les Sportsmatic 5 (cal.410/6606), les 66 Sportsmatic 5 (cal.6619) de Suwa et les Sportsmatic 5 Deluxe (cal.7606) et les 76 Sportsmatic 5 Deluxe (cal.7619) de Daini. Selon les sources, il se serait vendu entre 5 et 7 millions de ces montres uniquement sur le marché Japonais. Il n’existe pas à ma connaissance d’estimations pour les ventes globales.
Deuxième génération
Généralités
En Juillet 1967, le logo de la gamme est modernisé pour devenir l’écusson que l’on connaît classiquement aujourd’hui. Le nom Sportsmatic est abandonné pour simplement Seiko New 5. Ces nouveaux modèles sont équipés du calibre 51 pour les modèles Daini et 61 pour les modèles de Suwa.
Elles viennent donc en remplacement des Sportsmatic, avec des designs plus modernes et des calibres de nouvelle génération et plus fins. La pression est importante car la première génération a rencontré un succès historique et ce rafraîchissement de la gamme doit continuer sur la même lancée.
À l’image des Sportsmatic 5 qui ont eu une gamme normale et une gamme Deluxe, les New 5 suivront la même organisation. Par contre cette fois-ci, autant Suwa que Daini développeront une gamme normale et une gamme Deluxe, devenue DX.





Daini
Daini sort sa New 5 en Juillet 1967 avec son calibre 5126, suivi des New 5 DX en Octobre, animées par les calibre 5139. Ce mouvement propose le stop-seconde et le système de rétention d’huile Diafix qui font défaut au 5126, ce qui se traduit par un empierrement de 27 rubis contre 23 pour le 5126.
Suwa
En Juillet, ce sont d’abord les New 5 DX que Suwa commercialise avant de sortir les New 5 en Octobre. On retrouve le 6119 dans les New 5 et le 6106 dans les New 5 DX. Le 6106 est le mouvement de base dans la famille de montres équipées du calibre 61, que ce soit les chronographes 6139 et 6138, les plongeuses 6105 ou encore les 61GS.
Au-delà des différences de calibres que l’on retrouve entre les New 5 « normales» et les Deluxe, ces dernières sont plus qualitatives avec des logos appliqués par exemple.
Les prix
Chez Daini, les New 5 coutent entre 10,500 et 13,500 yens alors que les New 5 DX se négocient entre 13,500 et 15,500 yens.
Chez Suwa, les New 5 coutent entre 9,000 et 12,000 yens alors que les New 5 DX se négocient entre 12,00 et 15,000 yens.
Pour remettre les choses dans leur contexte, dans ce même catalogue, la 62GS day-date en acier coûtait 38,000 yens contre 44,000 pour la version plaqué or, la 44GS coutant elle 24,000 yens et la 62MAS 13,000 yens. Les prix des Seiko 5 DX correspondaient à ceux des Lord Marvel 36000 ou de la 44KS acier. Le Crown chronograph coûtait à ce moment seulement 8,500 yens.
Résumé
Il existe deux types de New 5:
Les New 5, avec deux versions, celles de Daini avec le calibre 5126 et celles de Suwa avec le calibre 6119
Les New 5 DX, avec deux versions, celles de Daini avec le calibre 5139 et celles de Suwa avec le calibre 6106
Remplaçantes des Sportsmatic 5 et Sportsmatic 5 Deluxe, les New 5 et New 5 DX sont donc la seconde génération de Seiko 5. Commercialisées de Juillet 1967 à Novembre 1969, elles seront remplacées par une troisième et dernière génération: les 5 Actus et les 5 Sports
Troisième génération
À la fin des années 60, le succès continue d’être au rendez-vous pour les Seiko 5, mais les choses évoluent vite aussi bien au niveau horloger qu’au niveau des modes et de la société. Les New 5 sont donc remplacées par deux familles de Seiko 5: les 5 Sports et les 5 Actus.
Seiko 5 Sports
Le mois de Juin 1968 signe également l'arrivée d’une gamme non moins mythique: les Seiko 5 Sports. Jusque là, les Seiko 5 étaient considérées comme des montres habillées étanches, mais Seiko introduit ici ce qu’ils appellent des montres « dynamiques » ou sportives.
Les Seiko 5 Sports répondent à quelques lignes directrices:
Étanchéité à 70m
Cadrans colorés
Verre hardlex à trempage spécial
Lunette tournante (interne ou externe) pour afficher facilement un temps écoulé
Système antichoc Diashock
Jour et date dans un guichet unique
Remontage automatique efficace
On retrouve parmi ces nouveautés de nombreux modèles très connus aujourd’hui comme les Rally Divers, Sushi Roll ou la Kamen Rider. Il s’agit là d’une continuité des New 5 puisqu’on retrouve à l’origine les mêmes mouvements: les 6119 et 6106 pour Suwa et le 5126 pour Daini, le 5139 ayant été abandonné. Puis dans un deuxième temps, Daini proposera le calibre 7019.
Pour y voir plus clair entre les différents modèles, regardons séparément les productions de Suwa et de Daini.
Daini
Entre Juin 1968 et fin 1970, Daini commercialise les 5 Sports équipées du calibre 5126 qui seront remplacées dès fin 1970 par des modèles équipés du calibre 7019 que l’on retrouvera jusqu’en 1973.
Suwa
De Juin 1968 à fin 1970, Suwa propose le calibre 6119 dans ses 5 Sports.
De Juin 1968 à fin 1969, on retrouve le calibre 6106 en version 25 rubis, qui sera remplacé fin 1970 par une version 23 rubis.
Les Seiko 5 Sports de Suwa disparaîtront fin 1971 mais Suwa continuera de proposer celles qui sont incontestablement les Seiko 5 les plus populaires de tous les temps: les chronographes Seiko 5 Sports Speed-Timer.
Les prix
Les Seiko 5 Sports de Suwa coutent entre 10,500 et 15,000 yens. Chez Daini, les 5 Sports se négocient entre 12,500 et 15,500 yens pour celles équipées du calibre 51 et entre 11,000 et 12,500 yens pour celles équipées du calibre 70.
Résumé
Les Seiko 5 Sports ont été commercialisées de Juin 1968 à 1973. On retrouve quatre grands types de Seiko 5 Sports:
Les modèles de Suwa équipés du calibre 6119, distribuées de Juin 1968 à fin 1970
Les modèles de Suwa équipés du calibre 6106, distribuées de Juin 1968 à fin 1971
Les modèles de Daini équipés du calibre 5126, distribués de Juin 1968 à fin 1970
Les modèles de Daini équipés du calibre 7019, distribués de fin 1970 à 1973
Les Seiko 5 Sports ont rencontré un très grand succès, aussi bien au Japon qu’à l’internationale. Mais on ne peut pas parler de Seiko 5 Sports sans évoquer les plus populaires d’entre toutes: les Seiko 5 Sports Speed-Timer.
Seiko 5 Sports speed-timer
Les Seiko 5 Sports Speed-Timer sont à la fois les Seiko 5 les plus populaires de tous les temps et les plus importantes historiquement, puisqu’il s’agit ni plus ni moins des premiers chronographes automatiques commercialisés au monde ! Une raison de plus, s’il en fallait, de faire rentrer les Seiko 5 dans l’histoire… Pogue, Bullhead, Kakume, Holy Grail, Sunrise, ces icônes étaient toutes des Seiko 5 Sports avant tout !
Le 21 Mai 1969, Suwa Seikosha commercialise au Japon et à l’international les 6139-6000 et 6139-6010. Quand Heuer et Zénith annoncent l’existence de leurs prototypes de chronographes automatiques début 1969, Seiko a déjà entamé la production de ses modèles commerciaux.
Les 6138 sont quant à eux sortis des ateliers de Suwa en Juin 1970 quelques mois après le 7017 de Daini. Ce dernier sera remplacé en Novembre 1972 par le 7015.
Les Speed-Timer calibre 70 font leur dernière apparition dans le catalogue de 1975 Volume 2.
Les Speed-Timer calibre 61 sont commercialisées sous le nom Seiko 5 Sports jusqu’en 1976. Dès 1977, la mention 5 Sports disparaît des cadrans et ne laisse place qu’au nom Speed-Timer. Les Speed-Timer sortent de collection fin 1978, mettant fin définitivement aux Seiko 5 Sports.
Les prix
Chez Suwa, les Speed-Timer 6139 coutent entre 16,000 et 21,000 yens alors que les 6138 coutent entre 19,000 et 24,000 yens.
Chez Daini, les Speed-Timer 7017 coutent entre 13,500 et 18,500 yens alors que les 7015 coutent entre 14,500 et 18,500 yens.
Résumé
Il existe quatre types de Seiko 5 Sports Speed-Timer:
Les modèles équipés du calibre 6139, commercialisés de Mai 1969 à fin 1978
Les modèles équipés du calibre 6138, commercialisés de Juin 1970 à fin 1978
Les modèles équipés du calibre 7017, commercialisés de 1970 à 1972
Les modèles équipés du calibre 7015, qui remplacent le 70SP en Novembre 1972 et sont commercialisés jusqu’à fin 1975
Seiko 5 Actus
En Novembre 1969, Seiko introduit les Seiko 5 Actus. Une des caractéristiques de ces Actus est d’avoir pour la première fois le jour en anglais ou en japonais. Pour y voir un peu plus clair, nous allons encore une fois séparer les production de Suwa et de Daini.








Suwa
Suwa propose toujours son fameux calibre 6106 mais cette fois-ci en deux déclinaisons: une version 23 rubis et une version 25 rubis. Cette différence permet de proposer des produits un peu plus abordables. La version 25 rubis sera abandonnée à partir de 1976.
Sur les 5 Actus calibre 61, une pression sur la couronne permet de changer la date et une pression forte sur la couronne permet de changer le jour.
Ces modèles se reconnaissent d’un coup d’œil grâce au logo SS appliqué à 6h sur le cadran, juste au-dessus du log de Suwa. SS signifie Second Setting puisque pour la troisième fois, une Seiko 5 est équipée du stop seconde (la première étant les Sportsmatic 5 Deluxe 7619 et les New 5 DX de Daini et leur 5139).
Daini
De son côté, Daini remplace son calibre 51 par le 70 en lançant le 7019. Dans la filiation des mouvements, le calibre 70 vient en remplacement du calibre 76. Le calibre 51 est un mouvement d’une toute autre lignée.
Sur les 5 Actus de Daini, la pression sur la couronne permet de changer le jour alors que la date peut être changée rapidement de manière classique, en tournant la couronne.
Contrairement aux 5 Actus de Suwa, les 5 Actus équipées du calibre 70 n’ont que l’éclair de Daini à 6h et pas de logo appliqué.
En 1976, le 5 disparaît du nom et seule la mention Actus reste sur l’ensemble de la gamme. Les Actus resteront au catalogue jusqu’à 1978 pour Suwa et 1979 pour Daini, les Actus calibre 70 étant donc les dernières représentantes de la gamme Seiko 5 à rester au catalogue.
Brochure Rah Rah Seiko - Credit Anthony Kable www.plus9time.com
Le cas particulier des Silverwave
La famille des Silverwave est très intéressante et fera l’objet d’un article dans le futur, mais il est intéressant de noter la courte existence de quatre modèles Seiko 5 Actus Silverwave.
Ces modèles sont équipés du calibre 6306 de Suwa et apparaissent uniquement dans le catalogue de 1976 Volume 1. Compte tenu du changement de nom de la gamme 5 Actus cette année-là pour devenir simplement Actus, le catalogue de 1977 Volume 1 montre ces mêmes modèles avec seulement le nom Actus à 12h et la mention Silverwave à 6h. Dès le catalogue de 1977 Volume 2, ces modèles ne portent plus le nom d’Actus mais tout simplement de Silverwave.
Cette petite originalité dans la famille Seiko 5 aura le mérite de rajouter un nouveau mouvement à la gamme, le fameux 6306 de la Turtle JDM. On retrouvera d’ailleurs une dizaine de modèles d’Actus équipées de ce calibre après la disparition du 5 de ces cadrans, que je ne compte donc pas dans les Seiko 5.
Ces modèles étaient proposés au prix de 20,000 yens.
Prix
À leur lancement, les 5 Actus de Suwa (calibre 61) en 25 rubis sont proposés à 13,000 yens, contre 11,000 à 12,000 yens pour la version 23 rubis. À la fin de leur commercialisation, les prix se situent entre 13,000 et 20,000 yens.
Les 5 Actus de Daini (calibre 51) sont vendues entre 9,000 et 11,000 yens à leur sortie, puis entre 14,000 et 17,000 yens à la fin de leur commercialisation.
Résumé
Il existe deux types de 5 Actus:
Les 5 Actus équipées du calibre 6106 (en 23 ou 25 rubis), commercialisées entre Novembre 1969 et 1978
Les 5 Actus équipées du calibre 7019, commercialisées entre Novembre 1969 et 1979
Comme nous l’avons vu avec cette troisième et dernière génération, le 5 a disparu des cadrans des Actus et des Sports entre 1976 et 1977. Cette disparition progressive du mythique 5 qui orne les cadrans de la gamme depuis 1963 annonçait en fait le déclin prochain de la gamme Seiko 5 sur le marché Japonais
Les abréviations
Tous ces modèles des Seiko 5 ont des abréviations que l’on retrouve dans les catalogues et qui permettent de très facilement distinguer de quelle génération et type de 5 on parle, comparables aux abréviations 62MAS, 44KS ou 56GS par exemple.
Première génération
Sportsmatic 5 calibre 410/6606: SMA 5
Sportsmatic 5 calibre 6619: 66SA 5
Sportsmatic 5 Deluxe calibre 7606: SMA 5D
Sportsmatic 5 Deluxe calibre 7619: 76-5D
Deuxième génération
New 5 Suwa calibre 6119: 61-5
New 5 Suwa DX calibre 6106: 61-5D
New 5 Daini calibre 5126: 51-5
New 5 DX Daini calibre 5139: 51-5D
Troisième génération
5 Sports Suwa calibre 6119: 61-5
5 Sports Suwa calibre 6106 (25j): 61-5D
5 Sports et 5 Actus Suwa calibre 6106 (23j): 61-5A
5 Sports Daini calibre 5126: 51-5
5 Sports et 5 Actus Daini calibre 7019: 70-5A
5 Sports Speed-Timer Suwa calibre 6139: 61SPM
5 Sports Speed-Timer Suwa calibre 6138: 51SPH
5 Sports Speed-Timer Daini calibre 7017: 70SP
5 Sports Speed-Timer Daini calibre 7015: 70SPS
Comme vous pouvez le voir, les abréviations sont liées aux mouvements, donc un montre équipée d’un mouvement spécifique gardera son abréviation d’origine peu importe la gamme. On retrouve donc toujours le code 51-5 pour une New 5 ou une 5 Sports de Daini puisqu’elles sont toutes les deux équipées du calibre 5126.
C’est pour cette raison que les 5 Sports peuvent être considérées comme la continuité des New 5 bien qu’elle n’en portent pas le nom, puisque globalement elles reprennent les mêmes mouvements que ces dernières. J’ai tout de même souhaité séparer les deuxièmes et troisièmes générations en m’appuyant plus sur la chronologie et la durée dans le temps des différentes gammes plutôt que sur les calibres employés, mais on pourrait tout aussi bien considérer qu’il n’y a que deux générations, celles d’avant Juillet 1967 et celles d’après Juillet 1967.
La fin des Seiko 5 Japonaises
Les Actus et les Sports seront les dernières Seiko 5 destinées au marché Japonais, disparaissant définitivement des catalogues en 1979.
La production et la distribution des Seiko 5 continuera en Asie du Sud Est jusqu’à aujourd’hui avec des dizaines et des dizaines de modèles emblématiques toujours équipés des calibres 61 et 70 puis finalement uniquement du fameux 7S, et plusieurs centaines de modèles pour hommes et pour femmes à des prix défiant toute concurrence.
À partir de 1979, les Seiko 5 ne sont donc plus distribuées au Japon, ce qui marque une quatrième ère dans l’histoire des Seiko 5, celle des Seiko 5 que j’appellerai les Seiko 5 « Asiatiques » en opposition aux Seiko 5 « Japonaises » produites de 1963 à 1979.
Le succès commercial
En 1967, Seiko avaient vendu plus de 5 millions de Seiko 5 sur le marché Japonais. Si on rajoute les New 5, les Actus et les Sports, l’estimation grimpe à plus de 10 millions de pièces. Sur cette même période, le nombre de Seiko 5 produites dépasse la production totale de montres automatiques en Suisse.
Mais bien que les Seiko 5 aient été arrêtées au Japon à la fin des années 70, elles ont continué à être produites et distribuées en Asie du Sud Est et ont continué à se vendre par millions sur l’ensemble du marché international jusqu’à nos jours.
Que ce soit par son succès entre 1963 et 1979, ou son succès après la disparition du marché Japonais, la gamme Seiko 5 est sans aucune doute possible la gamme la plus populaire de l’histoire de la marque, au point qu’elle soit presque devenue un synonyme de la marque en elle-même. Combien de site/forum/blog/amateur d’horlogerie conseille aux débutants en quête de montre abordable de se trouver une Seiko 5? Quel amateur de montre n’a jamais eu de Seiko 5?
Mais depuis sa disparition du marché Japonais, les Seiko 5 sont clairement devenues des produits d’entrée de gamme, ce qui n’était pas le cas jusqu’en 79 comme nous l’avons vu.
Le soucis, c’est que Seiko étant devenu clairement associé aux Seiko 5 sous nos latitudes, et ces Seiko 5 étant devenu uniquement des produits d’entrée de gamme, ça a clairement participé à cette vision réductrice de Seiko comme étant une marque d’entrée de gamme, proposant surtout des produits à bas prix.
Il n’empêche que pendant la quinzaine d’années où ces montres étaient conçues au Japon, les Seiko 5 étaient des produits de bonne voir très bonne qualité proposées à des prix abordables, sans pour autant être bas de gamme.
Mais c’est aussi, avec les plongeuses, la gamme qui a permis de populariser Seiko à l’international, profitant entre autres du tremplin des JO de 1964.
La crise Suisse des années 70
S’il est un sujet souvent incompris, c’est clairement celui de la crise horlogère qui a frappé la Suisse dans les années 70. Vous savez, la fameuse « crise du quartz ».
Pourtant, l’analyse des données économiques à notre disposition aujourd’hui permet de se rendre compte que cette crise ne doit rien au quartz puisqu’elle avait commencé dès la fin des années 60, avant la commercialisation des premiers quartz de Seiko. Il s’agit d’un sujet complexe qui sera traité dans un autre article, mais je peux d’ors et déjà vous rediriger vers les écrits de Pierre-Yves Donzé à ce sujet. Son analyse économique conclut que c’est en fait l’arrivée sur le marché mondial, à partir du milieu des années 60, d’une grande quantité de montres Japonaises de qualité équivalente aux Suisses et mais à des prix plus bas qui a mis à mal l’industrie horlogère Helvétique. Le quartz ne fut que le dernier clou du cercueil.
Cette crise était en fait une crise causée par la structure même du tissu industriel horloger en Suisse, très horizontalisée puisque reposant sur la sous-traitance, là où Seiko fonctionne de manière totalement verticalité, limitant les coûts et permettant donc de proposer des produits de qualité équivalente mais moins chers. Cette stratégie était une vision mise en place par le fondateur Kintaro Hattori après ses voyages en Europe et aux Etats-Unis à la fin des années 1800 et début 1900, preuve supplémentaire s’il en fallait du visionnaire qu’était Hattori !
Or, la majorité des montres exportées du Japon à cette période était composée de Seiko 5 ainsi que de plongeuses très populaires aux Etats-Unis. Il semble donc évident que les Seiko 5 ont joué un rôle déterminant dans l’objectif qu’avait fixé Shoji Hattori à cette période, objectif traduit par son slogan « rattraper et dépasser la Suisse ». Alors que la participation aux concours chronométriques des observatoires de Neuchâtel et Genève a permis à Seiko de rattraper et dépasser les Suisses du point de vue de la chronométrie, les premiers chrono automatiques 6139 et l’Astron 35SQ ont montré que Seiko avait rattrapé et dépassé la Suisse du point de vue de technique et de la technologie, et les Seiko 5 ont permis de rattraper et dépasser la Suisse d’un point de vue commercial, leur production dépassant celle de l’ensemble des montres automatiques Suisses à la même période.
La renaissance internationale
Après avoir été une gamme officielle de Seiko Japan de 1963 à 1979, puis après avoir été une gamme conçue et distribuée en Asie du Sud Est et non distribuée officiellement au Japon et en occident, les Seiko 5 font leur retour au sein du catalogue Seiko international en 2019 avec les Seiko 5 Sports, après exactement 40 ans d’absence.
Et pour marquer cette renaissance, Seiko a décider de revoir le design du logo de cette gamme, resté inchangé depuis 1967 ! La forme du blason reste mais le 5 et stylisé pour suivre les contours du fameux emblème pensé et dessiné par Ren Tanaka.
Comme à l’origine, les Seiko 5 Sports s’adressent à nouveau à un public plutôt jeune avec des montres abordables mais de qualité, mais également avec deux axes intéressants.
Le premier est l’inspiration de la culture des “mods”, ces Seiko modifiées et personnalisées avec des pièces aftermarket, particulièrement avec les SKX mais aussi quelques modèles de Seiko 5. En effet, Seiko propose maintenant de très nombreuses variations de son modèle de base inspiré de la SKX007, avec plusieurs styles ou univers et beaucoup de déclinaisons différentes. Un vrai plaisir pour les clients et pour les moddeurs! On retrouve exactement la même philosophie avec le site “Custom Watch Beatmaker” qui permet de jouer avec différentes pièces pour assembler sa propre version de la Seiko 5 Sports moderne. Et si votre design remporte le plus de vote, il peut devenir un modèle commercialisé !
L’autre axe intéressant est celui des produits se rattachant à la culture populaire, avec les séries de Seiko 5 Sports Street Fighter, One Piece, Brian May et Naruto que l’on a vu sortir ces derniers mois. Tout laisse à penser que nous verrons à l’avenir d’autres séries dans ce style, ancrées dans les culture pop et qui rencontrent un énorme succès chez les clients plutôt jeunes de la marque !
Les critiques que l’on entend beaucoup contre ces montres, malgré leur immense succès, est l’augmentation du prix et le fait que ce soit « trop cher pour une simple Seiko 5 ». Bien que la question du repositionnement tarifaire de Seiko soit intéressante, je pense qu’il est intéressant de faire un petit retour en arrière et de se rendre compte que les Seiko 5 n’ont pas toujours été des montres bas de gamme au prix hyper contenu, mais plutôt des montres milieu de gamme novatrices et qualitatives, voir historiques pour les Speed Timer.
Pour rappel, les Actus coutaient entre 10 et 20,000 yens, une Divers 6105 Naomi Uemura 20,000 yens, les Speed-Timer en moyenne dans les 20,000 yens aussi contre environ 30,000 yens pour une KS et entre 45 et 50,000 yens pour une GS classique.
Il faut donc garder en tête que les Seiko 5 n’ont pas toujours eu cette image, ça n’a pas toujours été les montres les moins chères possibles, mais au contraire c’est une gamme historique avec une énorme importance, qui a toujours su proposer des montres de bonne qualité mais abordables à la plupart des gens. C’est là la volonté qu’avait Ren Tanaka en créant ces Seiko 5.
Conclusion
Il est quand même assez paradoxal de constater que les “Five” constituent la gamme la plus populaire de Seiko depuis près de 60 ans et que c’est finalement une gamme dont l’histoire est très mal connue et comprise !
Oui, elles sont en grande partie devenues des montres entrée de gamme fabriquées par millions en Asie du Sud Est, mais elles ne sont pas que ça !
Elles ont été avant tout une gamme de qualité, emblématique des années 60 et 70, conçues à l’origine par le même trio de légendes à qui l’on doit Grand Seiko, elles ont figuré parmi les premières montres automatiques de Seiko, parmi les premières montres étanches du groupe, elles sont l’autre symbole des JO de 1964, elles représentent un des plus grand succès de Taro Tanaka. C’est également la première gamme de Seiko conçues aussi bien pour le marché interne que le marché international. C’est dans cette gamme que le retrouve les premiers chrono automatiques au monde et cette gamme fut une des raisons principales de la crise dramatique que l’horlogerie Suisse a traversé dans les années 70.
Les Five sont devenues aujourd’hui un des principales incarnations de Seiko et j’espère qu’à travers cet article, j’ai pu redorer un peu le fameux blason qui orne ces montres depuis plus d’un demi siècle !
Sources:
The International Horological Correspondance nº430 - Février 1996 - Taro Tanaka - “ファイブ” を覚えていますか?(Remember Seiko 5?)
Ryugo Sadao - The history of the Seiko Speed-Timer
Mori Takeshi - Domestic Watch – Seiko Automatic Updated Volume
https://www.plus9time.com/blog/2018/1/15/original-first-sportsmatic-five-bracelet
https://www.plus9time.com/blog/2017/11/4/original-five-features-of-sportsmatic-5
https://www.theseikoguy.com/catalogs
http://forumamontres.forumactif.com/t202714-revue-3615-ma-life
Lancement du GS9 Club aux Etats-Unis
Grand Seiko of America vient de faire une annonce qui devrait ravir tous les amateurs de la marque au lion avec la création du GS9 Club pour les Etats-Unis. Pour l’instant réservé au Japon, cet excellent club montre la volonté de la marque de continuer à entretenir une relation de proximité avec les clients et passionnés, mais aussi d’éduquer sur les valeurs et l’identité de la marque, le tout au travers d’un très bon site internet mais surtout d’organisation d’événements et probablement de l’édition d’une version anglaise de l’excellent magazine Japonais GS9 Magazine. Cette nouvelle peut également laisser espérer la création d’une branche du club chez nous en France dans les prochaines années.
Dans les jours qui ont précédé le 60ème anniversaire de Grand Seiko - que l’on a fêté le 18 Décembre - Grand Seiko of America avait teasé une annonce importante avec la sortie d’une montre qui serait dévoilée dans la nuit du 18 au 19, à 1h du matin heure Française, lors d’une conférence tenue sur Zoom.
Avant tout, il est vraiment appréciable de voir que les équipes de GS of America ont su s’adapter à la situation particulière liée au Covid et ont su encore plus se rapprocher des amateurs et clients grâce à Zoom. En effet, l’incontournable Joe Kirk (brand curator et training manager de GS of America et le meilleur porte parole de la marque au lion) a passé des heures et des heures sur Zoom depuis le début de la pandémie, ce qui n’aura pas manqué de ravir les amateurs anglophones de GS, puisqu’écouter Joe partager son amour pour GS est toujours un excellent moment ! Donc chapeau aux équipes de Brice Le Troadec, ce genre de chose manque cruellement par chez nous et j’espère que leurs efforts serviront d’exemple aux équipes Françaises !
Cette conférence tenue par Joe se tenant le jour même des 60 ans de Grand Seiko et puisqu’il avait été teasé qu’une nouvelle montre serait annoncée, il aurait été facile de penser qu’il s’agirait du dernier modèle du fameux « kanreki » ou 60ème anniversaire. Mais finalement il n’en était rien et je pense que l’annonce qui a été faite a probablement surpris tout le monde !
Malgré le jour choisi, il n’était pas question de parler d’anniversaire mais simplement de profiter de ce jour hautement symbolique pour faire l’annonce la plus excitante à laquelle je puisse penser: la création de la branche Américaine du GS9 Club !
Qu’est-ce que le GS9 Club?
Existant au Japon depuis 2015, il s’agit d’un club de collectionneurs et passionnés de Grand Seiko, ouvert aux clients ayant acheté leur montre dans un GS Master Shop ou Boutique au Japon et résident dans le pays. Par ce biais, la marque organise des évènements comme des rassemblements ou des visites de manufactures, et édite le GS9 Magazine, un excellent magazine bisannuel sur Grand Seiko et son univers.
Le site Plus9Time de Anthony Kable relate quelques-uns de ces évènements qui valent vraiment le détour:
https://www.plus9time.com/tokyo-gs9-club-event
https://www.plus9time.com/blog/2019/8/24/2019-gs9-club-event?rq=Gs9
Joe a donc annoncé la création de la branche Américaine du club et le lancement de leur site www.grandseikogs9club.com .
Sur ce site, vous trouverez de nombreux articles accessibles à tous ainsi que du contenu exclusif réservé aux membres du club, des évènements pour le club ainsi qu’une boutique en ligne avec là aussi des modèles spécifiques réservés aux membres du club.
Comment devenir membre du club?
Il faut avoir acheté sa GS dans une Grand Seiko Boutique, Salon ou Master Shop aux Etats-Unis après le 23 Mars 2017. Il ne sera pas possible d’envoyer des goodies ou produits hors des Etats-Unis, mais il est possible de rejoindre le groupe peu importe dans quel pays vous résidez, tant que vous remplissez la première condition. Il semblerait qu’un achat d’occasion ou en dehors du réseau officiel de distribution ne permette pas de rejoindre le club.
Le modèle commémoratif
Pour fêter ce lancement, un nouveau modèle limité à 110 exemplaires a été annoncé, le modèle Eagle ou washi (ワシ) en Japonais, rendant hommage à la pygargue à tête blanche, symbole des Etats-Unis.
Pour conclure
Je me réjouis particulièrement de la création de ce club car les événements et les publications du GS9 Club Japan sont exceptionnels et je sais que de tels projets menés par Joe et ses collaborateurs ne pourront qu’être tout aussi géniaux. Et même si pour l’instant il ne semble pas y avoir de tel projet pour la France ou même l’Europe, l’ouverture de ce club à l’extérieur du Japon ouvre le champ des possibles pour le vieux continent !
Cette annonce pourra peut-être sembler anecdotique aux yeux de certains mais je peux vous assurer que cela représente des années de travail et de négociations acharnées avec les Japonais. Mais au-delà de la somme de travail engagée, cette annonce montre la volonté de Grand Seiko de rester proche et d’entretenir une relation privilégiée avec sa « fan base », mais aussi d’éduquer les clients et amateurs à la culture et à l’ADN de la marque, ce qui jusqu’à présent faisait énormément défaut à mon sens.
Même si je n’ai pas toujours été en phase avec certains des choix stratégiques faits par la marque dernièrement, cette annonce est une excellente nouvelle et j’espère qu’elle ravira les autres amoureux de la marque !
Encore une fois toutes mes félicitations à Joe et à toutes les équipes de Brice Le Troadec !
Long live the GS9 Club !